La Magie n’est pas une religion dans le sens où la plupart des gens comprennent ce mot. La religion, dans le sens commun du terme, est même le contraire de la magie. L’une limite, l’autre libère. L’une exige des acrobaties intellectuelles pour adopter des croyances loufoques, l’autre consiste à adopter volontairement des croyances loufoques pour satisfaire ses buts. Ensuite, elle les élimine. La religion aspire à un seul mode de vie pour tout le monde, en tout temps et en tous lieux. A contrario, la Magie exige de la personnalité et de souplesse mentale.
Le magicien s’extrait de lui-même du monde « réel » pour se précipiter dans des situations bizarres préalablement planifiées. Il s’agit pour lui d’un théâtre des opérations ayant pour fonction d’affiner sa perception du monde et de ses différents rôles à l’intérieur de ce monde.
La religion exige une pensée pour ainsi dire vierge et de stigmatiser certains actes comme étant « mauvais ». La Magie embrasse et tente de comprendre tous les aspects de l’existence et de la pensée dans le but d’en faire quelque chose de différent, de chaud ou de froid, mais en aucun cas de tiède.
Le magicien ne croit en rien, dans le sens d’« avoir la foi ». Il expérimente concrètement pour s’assurer que les postulats qu’il a bâtis ou empruntés, possèdent quelque vérité ou valeur. Il est vrai qu’il conserve certaines croyances « organiques » pour son confort. Par exemple, il croit que le fauteuil dans lequel il est assis ou s’apprête à s’asseoir est réel – la plupart du temps. Mais ceci correspond moins à un processus mental qu’à un réflexe instinctif et organique, conditionnel de l’existence.
D’un point de vue abstrait, il existe de nombreux concepts qu’il utilise sans y croire, sauf dans des conditions soigneusement choisies. Les anges et les démons, par exemple, en tant qu’archétypes de la connaissance, l’énergie ou le pouvoir personnels sont d’utiles véhicules pour l’invocation, grâce auxquels le magicien peut examiner des facettes de lui-même, qui lui sont autrement difficilement accessibles. Dans cette finalité, il doit être capable de suspendre son incrédulité, et c’est ce que permet le Théâtre de la Magie.
Théâtre est le terme le plus approprié ici, car le Magicien s’extrait de ce qu’il estime normalement être la réalité, pour créer un univers malléable par le biais de sa volonté, son intelligence et son imagination. Plus étrange sera ce théâtre et moins le magicien risquera de confondre les activités qu’il y mène avec ses occupations quotidiennes.
Le théâtre inspiré de la Tradition est aussi valable que n’importe quel modèle de base. Il est improbable, absurde et parfaitement équipé. Le magicien possède une pièce spéciale, avec un décor particulier et des instruments spécifiques. Pour un non-magicien, cette pièce inspirera la peur, l’émerveillement ou l’hilarité. Pour le magicien, elle suscite un état d’esprit particulier et induit des changements.
L’aspirant magicien, s’il n’a pas d’idées, peut emprunter aux contes pour enfants ou aux grands textes de la Magie jusqu’à qu’il découvre ce qui lui convient. Il commencera ensuite à développer sa propre façon de faire, et pour filer la métaphore, il deviendra producteur, réalisateur, concepteur, scénariste, vedette et même public de son théâtre. Plus le script sera original et plus la mise en scène aura d’effets sur lui. Il n’aura pas besoin de limiter L’action à son Temple. Ces « drames » pourront être joués dans le monde réel à condition de sacrifier à quelques ajustements de croyances.
Exemple : le magicien imagine qu’il est le seul véritable être humain au monde, que les autres sont des androïdes mis à sa disposition pour l’aider à gérer les situations dans laquelle il se trouve. Cette position devra être conservée jusqu’à ce qu’une autre interprétation vienne la remplacer. Conviction contraire : le magicien se persuade que tous les autres sont des adeptes, sauf lui et que l’univers attend qu’il rattrape son retard pour avancer d’un nouveau pas dans l’évolution. Cette posture doit également être tenue jusqu’à ce qu’une autre interprétation vienne la remplacer. Durant ces phases, le magicien peut choisir de se mettre dans des situations impossibles dont il devra se sortir par lui-même. Ce genre d’exercices, correctement effectués, peuvent induire de nouvelles façons de penser, de nouveaux angles d’approche permettant d’appréhender les choses comme elles sont réellement. Mais pour cela, le magicien doit être capable de voir à long terme et de planifier soigneusement ses actes. Sans un minimum de prudence, la folie risque d’être le seul fruit qu’il récoltera.
Le Théâtre de la Magie. Ray Sherwin. Traduction française par Melmothia 2009. Titre original « The Theatre of Magick » extrait de l’ouvrage éponyme de Ray Sherwin, 1982.
Illustration interne à l’ouvrage The Theatre of Magick.
Par Ray Sherwin
La Magie n’est pas une religion dans le sens où la plupart des gens comprennent ce mot. La religion, dans le sens commun du terme, est même le contraire de la magie. L’une limite, l’autre libère. L’une exige des acrobaties intellectuelles pour adopter des croyances loufoques, l’autre consiste à adopter volontairement des croyances loufoques pour satisfaire ses buts. Ensuite, elle les élimine. La religion aspire à un seul mode de vie pour tout le monde, en tout temps et en tous lieux. A contrario, la Magie exige de la personnalité et de souplesse mentale.
Le magicien s’extrait de lui-même du monde « réel » pour se précipiter dans des situations bizarres préalablement planifiées. Il s’agit pour lui d’un théâtre des opérations ayant pour fonction d’affiner sa perception du monde et de ses différents rôles à l’intérieur de ce monde.
La religion exige une pensée pour ainsi dire vierge et de stigmatiser certains actes comme étant « mauvais ». La Magie embrasse et tente de comprendre tous les aspects de l’existence et de la pensée dans le but d’en faire quelque chose de différent, de chaud ou de froid, mais en aucun cas de tiède.
Le magicien ne croit en rien, dans le sens d’« avoir la foi ». Il expérimente concrètement pour s’assurer que les postulats qu’il a bâtis ou empruntés, possèdent quelque vérité ou valeur. Il est vrai qu’il conserve certaines croyances « organiques » pour son confort. Par exemple, il croit que le fauteuil dans lequel il est assis ou s’apprête à s’asseoir est réel – la plupart du temps. Mais ceci correspond moins à un processus mental qu’à un réflexe instinctif et organique, conditionnel de l’existence.
D’un point de vue abstrait, il existe de nombreux concepts qu’il utilise sans y croire, sauf dans des conditions soigneusement choisies. Les anges et les démons, par exemple, en tant qu’archétypes de la connaissance, l’énergie ou le pouvoir personnels sont d’utiles véhicules pour l’invocation, grâce auxquels le magicien peut examiner des facettes de lui-même, qui lui sont autrement difficilement accessibles. Dans cette finalité, il doit être capable de suspendre son incrédulité, et c’est ce que permet le Théâtre de la Magie.
Théâtre est le terme le plus approprié ici, car le Magicien s’extrait de ce qu’il estime normalement être la réalité, pour créer un univers malléable par le biais de sa volonté, son intelligence et son imagination. Plus étrange sera ce théâtre et moins le magicien risquera de confondre les activités qu’il y mène avec ses occupations quotidiennes.
Le théâtre inspiré de la Tradition est aussi valable que n’importe quel modèle de base. Il est improbable, absurde et parfaitement équipé. Le magicien possède une pièce spéciale, avec un décor particulier et des instruments spécifiques. Pour un non-magicien, cette pièce inspirera la peur, l’émerveillement ou l’hilarité. Pour le magicien, elle suscite un état d’esprit particulier et induit des changements.
L’aspirant magicien, s’il n’a pas d’idées, peut emprunter aux contes pour enfants ou aux grands textes de la Magie jusqu’à qu’il découvre ce qui lui convient. Il commencera ensuite à développer sa propre façon de faire, et pour filer la métaphore, il deviendra producteur, réalisateur, concepteur, scénariste, vedette et même public de son théâtre. Plus le script sera original et plus la mise en scène aura d’effets sur lui. Il n’aura pas besoin de limiter L’action à son Temple. Ces « drames » pourront être joués dans le monde réel à condition de sacrifier à quelques ajustements de croyances.
Exemple : le magicien imagine qu’il est le seul véritable être humain au monde, que les autres sont des androïdes mis à sa disposition pour l’aider à gérer les situations dans laquelle il se trouve. Cette position devra être conservée jusqu’à ce qu’une autre interprétation vienne la remplacer. Conviction contraire : le magicien se persuade que tous les autres sont des adeptes, sauf lui et que l’univers attend qu’il rattrape son retard pour avancer d’un nouveau pas dans l’évolution. Cette posture doit également être tenue jusqu’à ce qu’une autre interprétation vienne la remplacer. Durant ces phases, le magicien peut choisir de se mettre dans des situations impossibles dont il devra se sortir par lui-même. Ce genre d’exercices, correctement effectués, peuvent induire de nouvelles façons de penser, de nouveaux angles d’approche permettant d’appréhender les choses comme elles sont réellement. Mais pour cela, le magicien doit être capable de voir à long terme et de planifier soigneusement ses actes. Sans un minimum de prudence, la folie risque d’être le seul fruit qu’il récoltera.