« En conséquence, reconnaissez les Charlatans à leur amour des robes somptueuses, de la cérémonie, du rituel, des retraites magiques, des conditions absurdes, et d’autres stupidités encore, trop nombreuses pour être citées. Toute leur doctrine est un étalage de vantardise, une lâcheté tiraillée par la soif de notoriété ; leur norme étant tout ce qui n’est pas nécessaire, leur échec garanti à coup sûr. C’est pourquoi ceux qui possèdent une certaine compétence naturelle la perdent vite au contact de leur enseignement. » – Le Livre du Plaisir, p. 48-49
Nous reportons le lecteur à l’article sur la Chaos Magic de Jaq Hawkins concernant les données biographiques de Spare. Nous nous attacherons ici à décrire les pratiques et à brosser le tableau de l’influence de Spare sur la magie et, plus particulièrement, la Chaos Magic.
Le Kiaïsme
En octobre 1907, Spare monta sa première exposition à la Brutton Gallery de Londres. Le contenu intrigant de cette exposition, un mélange d’arcanes et de grotesque, attira l’attention d’Aleister Crowley (1). La collaboration entre Spare et Crowley commencera vers 1908 et Spare prendra les engagements de « Probationer » de l’Argenteum Astrum de Crowley en 1909 (2). Il contribua également à la publication de Crowley The Equinox en fournissant quatre dessins (3).
Quelle que fût la nature de la relation entre Crowley et Spare, celle-ci ne dura pas longtemps et un passage du Livre du Plaisir ne laisse planer aucune ambiguïté quant au regard que Spare portait sur la magie cérémonielle ou les magiciens :
« Certains louent la magie cérémonielle, et l’on dit qu’ils expérimentent une grande extase ! Nos asiles sont emplis, la scène déborde ! C’est par la symbolisation que nous sommes symbolisés ? Dois-je me couronner moi-même roi, dois-je être un roi ? Je devrais bien plutôt être un objet de dégoût et de pitié. Ces magiciens, dont la malhonnêteté est la sauvegarde, ne sont rien que des dandys oisifs de bordels » (4).
Le système magique que Spare nomme le « Kiaïsme » ne plonge ses racines dans aucune autre tradition ; le terme lui-même est original. Il prend naissance dans son premier livre, Earth Inferno (1905), est défini dans The Book of Pleasure (1913) et se développe jusque dans The Focus of Life.
Le Kiaïsme est fondé sur le concept de « Kia » qui se présente comme une doctrine philosophie et magique axée sur les signes tangibles et des représentations concrètes des expériences mystiques. Cependant, la qualité du « Kia » est définie comme étant « non potentielle ou manifestée (si ce n’est comme possibilité instantanée (5)) » ou comme « le quantum vierge par l’exubérance duquel nous sommes arrivés à l’existence » (6). S’il se trouve d’autres références aux qualités du « Kia » dans l’œuvre de Spare, il a toujours préféré cependant ne jamais le définir avec précision, car « moins on en parle (du Kia), et moins il est obscur » (7) !
La réelle difficulté que Spare rencontre pour forger une définition claire du « Kia » réside dans son immense dégoût pour toute « doctrine » en général (8) qui l’empêche de construire sur d’autres sources que ses propres écrits. Cependant, il semble qu’il y ait des similarités avec la philosophie gnostique de l’Être et du Non-Être dont Spare a eu connaissance durant ses jeunes années, à l’époque où il prétendait que les œuvres d’Homère, de Dante et d’Omar Khayyam étaient ses seules sources littéraires (9).
Peter Carroll, quant à lui, définit le « Kia » en ces termes : « l’unité qui apparaît à l’esprit afin d’exercer les fonctions jumelles de la volonté et de la perception est appelée Kia par les magiciens. Parfois, on l’appelle esprit ou âme ou force de vie » (10).
L’état suprême dans le Kiaïsme, le « Kia », est posé comme « la liberté absolue qui, étant libre, est assez puissante pour devenir « la réalité » en toute liberté à tout moment : par conséquent, il n’est ni potentiel ni manifeste (sauf comme une possibilité instantanée) par des « idées de liberté » ou par des « moyens », mais par l’Ego libéré pour le recevoir, étant libéré des idées à son propos, et en ne croyant pas en lui » (11).
Le Kiaïsme considère la Croyance et le Désir comme une grande dualité. Dans ce système, l’Ego est une partie du Moi qui appartient à un Être, tandis que le Moi comprend tout l’Être. Chaque humain est à la fois volonté et désir. Ce désir imagine une nouvelle croyance et la croyance, au moyen de la conceptualisation, émet de nouvelles idées de l’Ego. Spare nomme ces idées les « ramifications de la croyance » qui forment les différentes personnalités de l’Ego. Mais la volonté n’est que partielle, la Volonté réside dans le royaume du Moi, elle appartient au « Kia ».
Sur l’Amour de Soi
L’Amour de Soi est un état mental, une humeur ou une condition causés par l’émotion du rire qui devient le principe permettant à l’Ego d’établir une association universelle en permettant d’intégrer l’idée avant même sa conception (12). Ainsi, il n’est pas un reflet narcissique de l’Ego, mais un vide au sein de l’identité qui est alors librement capable de se déplacer dans les relations sociales, sans y être piégé ou s’y identifier. Au cœur du moi est l’Amour de Soi et plus que par toute autre étiquette telle que les comportements ou les croyances, il permet d’atteindre une grande liberté de mouvement et d’expression, sans impliquer le besoin d’une auto-définition (13).
« Le Dieu ‘Volonté’ ordonne d’obéir, sa justice terrorise tout le monde, elle est telle une épée. Tu ne valais que pour l’obéissance ! La ‘Volonté’ est l’ordre de croire, ta volonté est ce que tu as activement cru, pour avoir désiré la croyance ! Tu penses tandis que ‘cela’ désire ! La ‘Volonté’ est complexité, le moyen d’autres moyens. Appelle-la ou non libre volonté, au-delà de la volonté, la croyance qui s’épanouit en l’Amour de Soi (Self-love) – je ne connais pas de meilleur nom – devient libre de croire ce qu’elle désire. Ainsi es-tu libre de ne croire en rien relativement à la croyance. La ‘Vérité’ n’est pas difficile à comprendre. La ‘Vérité’ est sans volonté, la volonté ne possède pas la vérité ! La ‘Vérité’ est la volonté jamais crue, puisque celle-ci n’a pas de vérité ! ‘Ça pourrait être’ est la certitude immédiate ! Car ce sphinx obsédant du savoir nous montre-t-il vraiment ce que vaut cette ‘volonté de quelque chose’ ? Aussi n’est-il de risque plus grave que la Connaissance Absolue – bien que ne s’y trouve guère de danger ; voyez ce qu’il advient de l’omnipotent ! » (14).
L’alphabet sacré
L’Alphabet Sacré ou Alphabet du Désir est constitué de sceaux (ou sigils) simplifiés qui peuvent être assemblés afin d’exprimer un désir magique opératif. Ce concept se trouve expliqué en détail dans le Livre du Plaisir.
La première formule sigillaire apparaissant dans l’œuvre de Spare se trouve dans A Book of Satyrs. Spare utilisa un paquet de cartes qu’il appela l’« Arena of Anon » et dont chacune portait un emblème magique qui était une variation des lettres de l’Alphabet du Désir.
Dans Le Livre du Plaisir, Spare décrit un alphabet composé de vingt-deux lettres. En tant que « Probationer » de l’A.’.A.’. Spare avait accès au système crowleyien des correspondances du Liber 777. Cependant, Spare peut avoir découvert par lui-même les applications de la technique qu’il était en train de développer.
« Caché dans le labyrinthe de l’Alphabet se trouve mon nom sacré, le SCEAU de toutes choses inconnues. Sur Terre, mon royaume est Éternité de DESIR. Mon souhait s’incarne dans la croyance et devient chair, car JE SUIS LA VERITE VIVANTE » (15).
Les Sigils
« Par les Sceaux j’ai doté de sagesse les sots, rendu sots les sages, redonné la santé au malade et à l’infirme, la maladie au fort, etc. » (16)
Un Sigil est un glyphe ou un symbole qui possède une signification mystique ou magique. Les sigils, ou sceaux, sont construits sur la base de lettres d’alphabets vulgaires, sacrés ou personnels, lettres qui sont combinées en un glyphe simplifié destiné à exprimer la volonté magique que l’on désire rendre effective. Les sigils fonctionnent en utilisant directement l’inconscient, cette puissante matrice de la volonté magique. Ainsi, le travail par les sigils permettrait au magicien de se connecter, par le moyen des symboles, à l’inconscient & de fonctionner de manière subliminale. Le fondement théorique de nature subliminale des sigils peut se retrouver dans les œuvres de Jung & Freud : la barrière entre le conscient & l’inconscient est supprimée & toutes les pensées & impressions non logiques peuvent alors remonter à la surface & aider le magicien dans la projection de sa volonté dans son travail magique.
Spare pensait qu’afin que le langage soit véritablement efficace, chaque individu devait construire le sien propre, créer ses sigils à partir d’un matériau personnel parlant à son propre inconscient. Une part essentielle de la technique de Spare réside dans l’oubli délibéré des sigils après leur utilisation. La raison donnée par Spare à cet oubli du désir, mis en œuvre lors de l’invocation, réside dans le fait que pour que l’opération soit un succès, l’esprit conscient doit être tenu à l’écart. Les désirs formulés de manière consciente prennent du temps à se réaliser tandis que les désirs inconscients peuvent se matérialiser très rapidement. La conscience du désir bloque le processus et donc, il Spare en a conclu qu’il devait trouver une méthode afin d’oublier efficacement les désirs lors des évocations magiques. Il appela cette méthode l’« union au travers de la conscience absente » et la basa sur les techniques de yoga visant à atteindre un état de vide dans l’esprit. Comme cette méthode n’était pas totalement fiable, il développa la sigilisation des désirs.
Christopher Bray a dit ceci concernant les méthodes de sigilisation de Spare (17) : « Ainsi, dans son art et dans son écriture, Spare nous met dans l’ambiance en montrant quelle attitude nous devons adopter afin d’approcher l’ « angle du départ de la conscience » pour pénétrer dans l’infini. On doit se garder de la tentation de fonder des dogmes, car Spare a eu un grand mal à s’en défaire afin d’atteindre au succès de sa magie ; cependant, un ensemble de croyances de base sous-tendent la Chaos Magick. Le Chaos est le potentiel universel de la force créatrice, dans une tentative perpétuelle de pénétrer dans nos réalités personnelles et collectives. C’est le pouvoir d’Évolution et d’Involution. Le shamanisme est en chacun de nous et peut être utilisé si nous ajustons nos perceptions/attitudes et nous mettons en état d’accepter une Gnose spontanée ou en atteignant l’« angle du départ de la conscience et du temps ».
Laissons enfin la parole à Spare qui nous décrit la sigilisation en ces termes : « Les sigils sont un moyen permettant de guider et d’unir la croyance partiellement libre à un désir organique, d’assurer son maintien et sa mémoire jusqu’à ce qu’elle remplisse sa fonction dans le Moi subconscient, et son moyen de réincarnation dans l’Ego. Toute pensée peut être exprimée par une forme représentant une relation avec le réel. Les sigils sont des monogrammes de la pensée, servant au gouvernement de l’énergie (toute l’héraldique, les armoiries, les monogrammes – et les Karmas qu’ils régissent sont des sigils) renvoyant aux Karmas ; ils sont un moyen mathématique de symboliser le désir et de lui donner une forme qui puisse empêcher toute pensée sur, ou association à ce désir particulier (durant le temps magique), échappant ainsi à son examen par l’Ego, de sorte que ce dernier n’attache ou ne restreint pas tel ou tel désir à ses propres représentations transitoires, souvenirs et tracas, mais permet son libre accès au subconscient » (18).
Cette utilisation des lettres comme méthode de création de formes talismaniques, de sceaux et d’images télématiques n’est en réalité pas véritablement novatrice ou géniale. En effet, les noms angéliques et démoniaques furent sigilisés dès le Moyen-âge par les sorciers et l’on retrouve les mêmes procédés dans les œuvres d’Agrippa, par exemple. Cependant, l’originalité de Spare, si l’on peut dire, fut que dans son système éclectique et pratique, il méprisa toute forme de rituel, de décorum ou de dogme, au seul bénéfice de l’utilisation des sceaux en conjonction avec la technique de la Posture de la Mort, et ce, sans aucune base religieuse ou dogmatique, sans dieux ni démons particuliers. Pour lui, la seule et unique source du pouvoir magique provient de la Volonté et du Désir associés à la Croyance.
La Posture de la Mort
La « Posture de la Mort » est une technique magique développée par Spare visant à atteindre un état de vacuité mentale visant à produire la réalisation d’une opération magique par un sigil de désir. Cette posture consiste à se tenir sur la pointe des pieds, les bras croisés derrière la tête, le corps étendu le plus possible vers le haut tout en adoptant une respiration spasmodique, et ce jusqu’à atteindre un état d’épuisement. Cette posture est généralement pratiquée après la conception du sigil, juste avant son oubli.
« Se tenant sur la pointe des pieds, les bras raides et tendus à l’extrême à arrière de la tête, les mains serrée, le cou étiré, respirant de façon spasmodique et profonde, jusqu’à ce que le vertige et la sensation viennent par vagues et amènent l’épuisement.
Contemplez votre reflet jusqu’à ce qu’il devienne flou et que vous ne puissiez plus reconnaître celui qui regarde, fermez les yeux (cela arrive d’habitude involontairement) et visualisez. La Lumière (toujours un X aux étranges mouvements) que l’on voit doit être fixée – on ne doit jamais la laisser s’évanouir – jusqu’à ce que l’effort soit oublié, ce qui procure une sensation d’infini (qui perçoit une petite forme) dont vous ne pouvez atteindre les limites. Cela devrait être pratiqué avant ce qui précède. L’émotion ressentie explicite le pourquoi.
[…] par elle (la posture de la mort) nous échappons à notre interminable retard – par son attachement, l’Ego est balayé comme une feuille sous le vent violent – dans la fugacité de l’indéterminable, ce qui est toujours sur le point d’arriver devient sa vérité. Les choses allant de soi cessent d’être obscures […] C’est le corps mort à tout ce que nous croyons, et il se réveillera cadavre. L’Ego, sujet à la loi, recherche l’inertie dans le sommeil et la mort. Connaissez la posture de la mort et sa réalité dans l’annihilation de la loi – l’ascension hors de la dualité. […] Il existe de nombreux exercices préliminaires, aussi innombrables que les péchés, futiles en eux-mêmes, mais révélant les moyens finaux. Adoptez la posture de la mort, dans l’absence de toute conception du ‘Ni Ceci-Ni Cela’, jusqu’à ce que le désir soit satisfait dans l’acte de plaisir. […] Pratiquez donc quotidiennement, jusqu’à parvenir au centre du désir. […] Bien sûr, je trouve la satisfaction dans l’extase. Je viens de vous dire un secret de grande importance, enfant j’en eus connaissance. » (19).
Zos Kia Cultus
« Notre Livre Sacré : le Livre du Plaisir.
Notre Voie : le sentier éclectique entre les extases ; la voie précaire du funambule.
Notre Divinité : la femme Toute-Puissante (et j’errais à ses côtés le long du chemin direct…).
Notre Foi : (et à nouveau je dis que voilà votre grand moment de réalité ) la chair vivante / Zos.
Notre Sacrement : les Saints Concepts Intercalaires.
Notre Mot : pas d’importance – nul besoin.
Notre Demeure Éternelle : l’état mystique de Non-Négation ; le « je » atmosphérique / Kia.
Notre Loi : le trépas de toutes les lois. »
Manifeste selon AO Spare :
« Je crois en la chair maintenant et pour toujours… car je suis la Lumière, la Vérité, la Loi, la Voie et nul ne peut aboutir à quoi que ce soit si ce n’est par sa chair. Ne t’ai-je pas divulgué la voie éclectique vers l’extase ; cette précaire voie funambule… Mais tu n’as eu aucun courage, tu étais fatigué et apeuré. RÉVEILLE-TOI DONC ! Déshypnotise-toi de cette pauvre réalité en laquelle tu « croîs » (20) […] Laisse les autres attendre leurs immolations involontaires, ces rédemptions forcées si certaines pour les apostats de la Vie. Je te demande maintenant de rassembler tes souvenirs, car la grande unité est proche. Le Fondateur de toute mémoire est ton Âme. La Vie est désir, la Mort est réformation… Je suis la résurrection… Moi, qui transcende l’extase par l’extase, méditant le « Besoin de n’Être Pas » dans l’Amour de Soi. » (21).
Certaines des techniques de Spare, et plus particulièrement l’utilisation des sigils et la création d’« Alphabets du désir », furent adoptées et popularisées par Peter Carroll dans son livre Liber Null & Psychonaut. Carroll ainsi que d’autres comme Ray Sherwin ont joué un rôle important dans l’émergence des idées de Spare dans l’occulture britannique et de la Chaos Magick.
Actuellement, les praticiens de la Chaos Magick utilisent, sans parfois imaginer leurs sources, les techniques de la sigilisation, de l’oubli, de la posture de la mort, des alphabets sacrés personnels. On doit sans doute à Spare le dépouillement doctrinal des pratiques de la Chaos, qu’il s’agisse là d’un legs direct ou non, cela importe peu, mais nous sommes là, comme avec Spare, très loin des turpitudes monomaniaques de l’occultisme magique d’un Crowley ou d’un Bardon. Les longues pages dédiées par Spare à une forme de spiritualité absconse et parfois fumeuse doivent donc être remises dans leur contexte par rapport aux buts recherchés : la simplicité dans une pratique dépouillée des oripeaux de la magie cérémonielle psychorigide et dogmaniaque du passé.
Mini vocabulaire de Zos-Kia
Entre-deux : un état de transe dans lequel l’esprit est vide, la voie directe vers l’inconscient est libre. Dans cet état, les sigils sont plantés & ensuite oubliés. On peut le comparer au temps entre les temps.
Kia : le Moi atmosphérique. C’est le Moi opposé à l’ego ou à la véritable volonté. Kia est le système neural supérieur activé, libre de toute contrainte mortelle. Son symbole est l’oeil. Zos serait celui de son opposé.
Conscience Cosmique : la fusion avec le Kia, la conscience est libre de toute contrainte du corps ou des formes. Elle contient tout et peut se comparer à l’état de Samadhi.
Ni-Ni : état de vide (entre-deux) dans lequel la fusion avec le Kia peut arriver.
Posture de la Mort : Simulation de la mort, état dans lequel l’esprit est totalement vide. Cette technique est utilisée afin d’entrer dans l’état de « ni-ni ».
Zos : le corps, symbolisé par la main. Zos comprend toutes nos expériences & tous nos états d’esprit. Il est l’opposé du Kia. « Le corps considéré comme un tout, voilà ce que je nomme Zos. » (The Book of Pleasure)
** Ce vocabulaire est tiré de l’article « Zos-Kia » de Arawyn con Thanatos.
Les Œuvres principales :
− Earth Inferno (1905) ;
− A Book of Satyrs (1907) ;
− The Book of Pleasure (1913) ;
− The Focus of Life (1921) ;
− Anathema of Zos (1927).
« Mon ambition est la MORT,
Mort prématurée et avec elle l’amour de l’attention,
Et aussi le Joyau dans le Lotus.
La tristesse ne me retient pas
Si ce n’est le Péché et la Mort.
Je suis même exempt de mes propres PLAISIRS créés –
La stérilité de cette vie seule demeure.
Cependant, dans le désespoir nous commençons à percevoir la véritable lumière. AMEN.
Dans la faiblesse nous pouvons devenir forts.
Révère le Kia et Ton esprit sera alors APAISÉ »
Austin Osman Spare, le magicien, Spartakus FreeMann, novembre 2008 e.v.
(1) Keith Richmond, Discord In The Garden Of Janus – Aleister Crowley and Austin Osman Spare.
(2) Un document intitulé « le serment du probationer » de la Collection de Gerald Yorke, au Warburg Insitute, indique que Spare prit ses engagements le 10 juillet 1909.
(3) Dans l’édition de The Equinox, Vol. 1, No. 2, Londres, septembre 1909, Spare contribua avec deux dessins qui furent placés dans un article sur la géomancie. Il a également fourni deux diagrammes pour le même numéro de la revue, numérotés 33, le Jardin d’Eden, et 51, la Chute.
(4) Austin Osman Spare, The Book of Pleasure (Self-Love), The Psychology of Ecstasy, 1913
(5) Spare, Austin Osman, The Book of Pleasure, chap. « Definitions », I-H-O Books, 2005
(6) Spare, Austin Osman, The Book of Pleasure, chap. « The Consumers of Religion », I-H-O Books, 2005
(7) Spare, Austin Osman, The Book of Pleasure, chap. « Definitions », I-H-O Books, 2005
(8) Spare, Austin Osman, The Book of Pleasure, chap. « Be ye mystic », I-H-O Books, 2005
(9) Semple, W. Gavin, Zos-Kia, Fulgur Limited, 1995, page 7
(10) Carrol, Peter, Liber Null, page 26
(11) Austin Osman Spare, The Book of Pleasure.
(12) Spare, Austin Osman, The Book of Pleasure.
(13) Hine, Phil, Condensed Chaos, New Falcon, 1995, pp 127-128
(14) Austin Osman Spare, The Book of Pleasure.
(15) Austin Osam Spare, Anathema of Zos, p.15
(16) Austin Osman Spare, The Book of Pleasure (traduction française P. Pissier)
(17) Introduction à The Collected Works of Austin Osman Spare
(18) Austin Osman Spare, The Book of Pleasure (traduction française Spartakus FreeMann)
(19) Austin Osman Spare, The Book of Pleasure. (Traduction française par Spartakus FreeMann).
(20) En anglais « be-lie et be-live », qui est intraduisible en français, et que nous rendons par une confusion entre croître et croire.
(21) Austin Osman Spare, Creed of Zos vel Thanatos.
Cet article est basé sur :
La page Wikipedia « Austin Osman Spare ».
L’article « La Sigilisation au Sein de la Magie du Chaos », Spartakus FreeMann.
L’article « Zos-Kia » de Arawyn con Thanatos.
Zos-Kia : An Introductory Essay on the Art and Sorcery of Austin Osman Spare, Gavin Semple, Ed. Fulgur, 1995.
Par Spartakus FreeMann
« En conséquence, reconnaissez les Charlatans à leur amour des robes somptueuses, de la cérémonie, du rituel, des retraites magiques, des conditions absurdes, et d’autres stupidités encore, trop nombreuses pour être citées. Toute leur doctrine est un étalage de vantardise, une lâcheté tiraillée par la soif de notoriété ; leur norme étant tout ce qui n’est pas nécessaire, leur échec garanti à coup sûr. C’est pourquoi ceux qui possèdent une certaine compétence naturelle la perdent vite au contact de leur enseignement. » – Le Livre du Plaisir, p. 48-49
Nous reportons le lecteur à l’article sur la Chaos Magic de Jaq Hawkins concernant les données biographiques de Spare. Nous nous attacherons ici à décrire les pratiques et à brosser le tableau de l’influence de Spare sur la magie et, plus particulièrement, la Chaos Magic.
Le Kiaïsme
En octobre 1907, Spare monta sa première exposition à la Brutton Gallery de Londres. Le contenu intrigant de cette exposition, un mélange d’arcanes et de grotesque, attira l’attention d’Aleister Crowley (1). La collaboration entre Spare et Crowley commencera vers 1908 et Spare prendra les engagements de « Probationer » de l’Argenteum Astrum de Crowley en 1909 (2). Il contribua également à la publication de Crowley The Equinox en fournissant quatre dessins (3).
Quelle que fût la nature de la relation entre Crowley et Spare, celle-ci ne dura pas longtemps et un passage du Livre du Plaisir ne laisse planer aucune ambiguïté quant au regard que Spare portait sur la magie cérémonielle ou les magiciens :
« Certains louent la magie cérémonielle, et l’on dit qu’ils expérimentent une grande extase ! Nos asiles sont emplis, la scène déborde ! C’est par la symbolisation que nous sommes symbolisés ? Dois-je me couronner moi-même roi, dois-je être un roi ? Je devrais bien plutôt être un objet de dégoût et de pitié. Ces magiciens, dont la malhonnêteté est la sauvegarde, ne sont rien que des dandys oisifs de bordels » (4).
Le système magique que Spare nomme le « Kiaïsme » ne plonge ses racines dans aucune autre tradition ; le terme lui-même est original. Il prend naissance dans son premier livre, Earth Inferno (1905), est défini dans The Book of Pleasure (1913) et se développe jusque dans The Focus of Life.
Le Kiaïsme est fondé sur le concept de « Kia » qui se présente comme une doctrine philosophie et magique axée sur les signes tangibles et des représentations concrètes des expériences mystiques. Cependant, la qualité du « Kia » est définie comme étant « non potentielle ou manifestée (si ce n’est comme possibilité instantanée (5)) » ou comme « le quantum vierge par l’exubérance duquel nous sommes arrivés à l’existence » (6). S’il se trouve d’autres références aux qualités du « Kia » dans l’œuvre de Spare, il a toujours préféré cependant ne jamais le définir avec précision, car « moins on en parle (du Kia), et moins il est obscur » (7) !
La réelle difficulté que Spare rencontre pour forger une définition claire du « Kia » réside dans son immense dégoût pour toute « doctrine » en général (8) qui l’empêche de construire sur d’autres sources que ses propres écrits. Cependant, il semble qu’il y ait des similarités avec la philosophie gnostique de l’Être et du Non-Être dont Spare a eu connaissance durant ses jeunes années, à l’époque où il prétendait que les œuvres d’Homère, de Dante et d’Omar Khayyam étaient ses seules sources littéraires (9).
Peter Carroll, quant à lui, définit le « Kia » en ces termes : « l’unité qui apparaît à l’esprit afin d’exercer les fonctions jumelles de la volonté et de la perception est appelée Kia par les magiciens. Parfois, on l’appelle esprit ou âme ou force de vie » (10).
L’état suprême dans le Kiaïsme, le « Kia », est posé comme « la liberté absolue qui, étant libre, est assez puissante pour devenir « la réalité » en toute liberté à tout moment : par conséquent, il n’est ni potentiel ni manifeste (sauf comme une possibilité instantanée) par des « idées de liberté » ou par des « moyens », mais par l’Ego libéré pour le recevoir, étant libéré des idées à son propos, et en ne croyant pas en lui » (11).
Le Kiaïsme considère la Croyance et le Désir comme une grande dualité. Dans ce système, l’Ego est une partie du Moi qui appartient à un Être, tandis que le Moi comprend tout l’Être. Chaque humain est à la fois volonté et désir. Ce désir imagine une nouvelle croyance et la croyance, au moyen de la conceptualisation, émet de nouvelles idées de l’Ego. Spare nomme ces idées les « ramifications de la croyance » qui forment les différentes personnalités de l’Ego. Mais la volonté n’est que partielle, la Volonté réside dans le royaume du Moi, elle appartient au « Kia ».
Sur l’Amour de Soi
L’Amour de Soi est un état mental, une humeur ou une condition causés par l’émotion du rire qui devient le principe permettant à l’Ego d’établir une association universelle en permettant d’intégrer l’idée avant même sa conception (12). Ainsi, il n’est pas un reflet narcissique de l’Ego, mais un vide au sein de l’identité qui est alors librement capable de se déplacer dans les relations sociales, sans y être piégé ou s’y identifier. Au cœur du moi est l’Amour de Soi et plus que par toute autre étiquette telle que les comportements ou les croyances, il permet d’atteindre une grande liberté de mouvement et d’expression, sans impliquer le besoin d’une auto-définition (13).
« Le Dieu ‘Volonté’ ordonne d’obéir, sa justice terrorise tout le monde, elle est telle une épée. Tu ne valais que pour l’obéissance ! La ‘Volonté’ est l’ordre de croire, ta volonté est ce que tu as activement cru, pour avoir désiré la croyance ! Tu penses tandis que ‘cela’ désire ! La ‘Volonté’ est complexité, le moyen d’autres moyens. Appelle-la ou non libre volonté, au-delà de la volonté, la croyance qui s’épanouit en l’Amour de Soi (Self-love) – je ne connais pas de meilleur nom – devient libre de croire ce qu’elle désire. Ainsi es-tu libre de ne croire en rien relativement à la croyance. La ‘Vérité’ n’est pas difficile à comprendre. La ‘Vérité’ est sans volonté, la volonté ne possède pas la vérité ! La ‘Vérité’ est la volonté jamais crue, puisque celle-ci n’a pas de vérité ! ‘Ça pourrait être’ est la certitude immédiate ! Car ce sphinx obsédant du savoir nous montre-t-il vraiment ce que vaut cette ‘volonté de quelque chose’ ? Aussi n’est-il de risque plus grave que la Connaissance Absolue – bien que ne s’y trouve guère de danger ; voyez ce qu’il advient de l’omnipotent ! » (14).
L’alphabet sacré
L’Alphabet Sacré ou Alphabet du Désir est constitué de sceaux (ou sigils) simplifiés qui peuvent être assemblés afin d’exprimer un désir magique opératif. Ce concept se trouve expliqué en détail dans le Livre du Plaisir.
La première formule sigillaire apparaissant dans l’œuvre de Spare se trouve dans A Book of Satyrs. Spare utilisa un paquet de cartes qu’il appela l’« Arena of Anon » et dont chacune portait un emblème magique qui était une variation des lettres de l’Alphabet du Désir.
Dans Le Livre du Plaisir, Spare décrit un alphabet composé de vingt-deux lettres. En tant que « Probationer » de l’A.’.A.’. Spare avait accès au système crowleyien des correspondances du Liber 777. Cependant, Spare peut avoir découvert par lui-même les applications de la technique qu’il était en train de développer.
« Caché dans le labyrinthe de l’Alphabet se trouve mon nom sacré, le SCEAU de toutes choses inconnues. Sur Terre, mon royaume est Éternité de DESIR. Mon souhait s’incarne dans la croyance et devient chair, car JE SUIS LA VERITE VIVANTE » (15).
Les Sigils
« Par les Sceaux j’ai doté de sagesse les sots, rendu sots les sages, redonné la santé au malade et à l’infirme, la maladie au fort, etc. » (16)
Un Sigil est un glyphe ou un symbole qui possède une signification mystique ou magique. Les sigils, ou sceaux, sont construits sur la base de lettres d’alphabets vulgaires, sacrés ou personnels, lettres qui sont combinées en un glyphe simplifié destiné à exprimer la volonté magique que l’on désire rendre effective. Les sigils fonctionnent en utilisant directement l’inconscient, cette puissante matrice de la volonté magique. Ainsi, le travail par les sigils permettrait au magicien de se connecter, par le moyen des symboles, à l’inconscient & de fonctionner de manière subliminale. Le fondement théorique de nature subliminale des sigils peut se retrouver dans les œuvres de Jung & Freud : la barrière entre le conscient & l’inconscient est supprimée & toutes les pensées & impressions non logiques peuvent alors remonter à la surface & aider le magicien dans la projection de sa volonté dans son travail magique.
Spare pensait qu’afin que le langage soit véritablement efficace, chaque individu devait construire le sien propre, créer ses sigils à partir d’un matériau personnel parlant à son propre inconscient. Une part essentielle de la technique de Spare réside dans l’oubli délibéré des sigils après leur utilisation. La raison donnée par Spare à cet oubli du désir, mis en œuvre lors de l’invocation, réside dans le fait que pour que l’opération soit un succès, l’esprit conscient doit être tenu à l’écart. Les désirs formulés de manière consciente prennent du temps à se réaliser tandis que les désirs inconscients peuvent se matérialiser très rapidement. La conscience du désir bloque le processus et donc, il Spare en a conclu qu’il devait trouver une méthode afin d’oublier efficacement les désirs lors des évocations magiques. Il appela cette méthode l’« union au travers de la conscience absente » et la basa sur les techniques de yoga visant à atteindre un état de vide dans l’esprit. Comme cette méthode n’était pas totalement fiable, il développa la sigilisation des désirs.
Christopher Bray a dit ceci concernant les méthodes de sigilisation de Spare (17) : « Ainsi, dans son art et dans son écriture, Spare nous met dans l’ambiance en montrant quelle attitude nous devons adopter afin d’approcher l’ « angle du départ de la conscience » pour pénétrer dans l’infini. On doit se garder de la tentation de fonder des dogmes, car Spare a eu un grand mal à s’en défaire afin d’atteindre au succès de sa magie ; cependant, un ensemble de croyances de base sous-tendent la Chaos Magick. Le Chaos est le potentiel universel de la force créatrice, dans une tentative perpétuelle de pénétrer dans nos réalités personnelles et collectives. C’est le pouvoir d’Évolution et d’Involution. Le shamanisme est en chacun de nous et peut être utilisé si nous ajustons nos perceptions/attitudes et nous mettons en état d’accepter une Gnose spontanée ou en atteignant l’« angle du départ de la conscience et du temps ».
Laissons enfin la parole à Spare qui nous décrit la sigilisation en ces termes : « Les sigils sont un moyen permettant de guider et d’unir la croyance partiellement libre à un désir organique, d’assurer son maintien et sa mémoire jusqu’à ce qu’elle remplisse sa fonction dans le Moi subconscient, et son moyen de réincarnation dans l’Ego. Toute pensée peut être exprimée par une forme représentant une relation avec le réel. Les sigils sont des monogrammes de la pensée, servant au gouvernement de l’énergie (toute l’héraldique, les armoiries, les monogrammes – et les Karmas qu’ils régissent sont des sigils) renvoyant aux Karmas ; ils sont un moyen mathématique de symboliser le désir et de lui donner une forme qui puisse empêcher toute pensée sur, ou association à ce désir particulier (durant le temps magique), échappant ainsi à son examen par l’Ego, de sorte que ce dernier n’attache ou ne restreint pas tel ou tel désir à ses propres représentations transitoires, souvenirs et tracas, mais permet son libre accès au subconscient » (18).
Cette utilisation des lettres comme méthode de création de formes talismaniques, de sceaux et d’images télématiques n’est en réalité pas véritablement novatrice ou géniale. En effet, les noms angéliques et démoniaques furent sigilisés dès le Moyen-âge par les sorciers et l’on retrouve les mêmes procédés dans les œuvres d’Agrippa, par exemple. Cependant, l’originalité de Spare, si l’on peut dire, fut que dans son système éclectique et pratique, il méprisa toute forme de rituel, de décorum ou de dogme, au seul bénéfice de l’utilisation des sceaux en conjonction avec la technique de la Posture de la Mort, et ce, sans aucune base religieuse ou dogmatique, sans dieux ni démons particuliers. Pour lui, la seule et unique source du pouvoir magique provient de la Volonté et du Désir associés à la Croyance.
La Posture de la Mort
La « Posture de la Mort » est une technique magique développée par Spare visant à atteindre un état de vacuité mentale visant à produire la réalisation d’une opération magique par un sigil de désir. Cette posture consiste à se tenir sur la pointe des pieds, les bras croisés derrière la tête, le corps étendu le plus possible vers le haut tout en adoptant une respiration spasmodique, et ce jusqu’à atteindre un état d’épuisement. Cette posture est généralement pratiquée après la conception du sigil, juste avant son oubli.
« Se tenant sur la pointe des pieds, les bras raides et tendus à l’extrême à arrière de la tête, les mains serrée, le cou étiré, respirant de façon spasmodique et profonde, jusqu’à ce que le vertige et la sensation viennent par vagues et amènent l’épuisement.
Contemplez votre reflet jusqu’à ce qu’il devienne flou et que vous ne puissiez plus reconnaître celui qui regarde, fermez les yeux (cela arrive d’habitude involontairement) et visualisez. La Lumière (toujours un X aux étranges mouvements) que l’on voit doit être fixée – on ne doit jamais la laisser s’évanouir – jusqu’à ce que l’effort soit oublié, ce qui procure une sensation d’infini (qui perçoit une petite forme) dont vous ne pouvez atteindre les limites. Cela devrait être pratiqué avant ce qui précède. L’émotion ressentie explicite le pourquoi.
[…] par elle (la posture de la mort) nous échappons à notre interminable retard – par son attachement, l’Ego est balayé comme une feuille sous le vent violent – dans la fugacité de l’indéterminable, ce qui est toujours sur le point d’arriver devient sa vérité. Les choses allant de soi cessent d’être obscures […] C’est le corps mort à tout ce que nous croyons, et il se réveillera cadavre. L’Ego, sujet à la loi, recherche l’inertie dans le sommeil et la mort. Connaissez la posture de la mort et sa réalité dans l’annihilation de la loi – l’ascension hors de la dualité. […] Il existe de nombreux exercices préliminaires, aussi innombrables que les péchés, futiles en eux-mêmes, mais révélant les moyens finaux. Adoptez la posture de la mort, dans l’absence de toute conception du ‘Ni Ceci-Ni Cela’, jusqu’à ce que le désir soit satisfait dans l’acte de plaisir. […] Pratiquez donc quotidiennement, jusqu’à parvenir au centre du désir. […] Bien sûr, je trouve la satisfaction dans l’extase. Je viens de vous dire un secret de grande importance, enfant j’en eus connaissance. » (19).
Zos Kia Cultus
« Notre Livre Sacré : le Livre du Plaisir.
Notre Voie : le sentier éclectique entre les extases ; la voie précaire du funambule.
Notre Divinité : la femme Toute-Puissante (et j’errais à ses côtés le long du chemin direct…).
Notre Foi : (et à nouveau je dis que voilà votre grand moment de réalité ) la chair vivante / Zos.
Notre Sacrement : les Saints Concepts Intercalaires.
Notre Mot : pas d’importance – nul besoin.
Notre Demeure Éternelle : l’état mystique de Non-Négation ; le « je » atmosphérique / Kia.
Notre Loi : le trépas de toutes les lois. »
Manifeste selon AO Spare :
« Je crois en la chair maintenant et pour toujours… car je suis la Lumière, la Vérité, la Loi, la Voie et nul ne peut aboutir à quoi que ce soit si ce n’est par sa chair. Ne t’ai-je pas divulgué la voie éclectique vers l’extase ; cette précaire voie funambule… Mais tu n’as eu aucun courage, tu étais fatigué et apeuré. RÉVEILLE-TOI DONC ! Déshypnotise-toi de cette pauvre réalité en laquelle tu « croîs » (20) […] Laisse les autres attendre leurs immolations involontaires, ces rédemptions forcées si certaines pour les apostats de la Vie. Je te demande maintenant de rassembler tes souvenirs, car la grande unité est proche. Le Fondateur de toute mémoire est ton Âme. La Vie est désir, la Mort est réformation… Je suis la résurrection… Moi, qui transcende l’extase par l’extase, méditant le « Besoin de n’Être Pas » dans l’Amour de Soi. » (21).
L’influence sur la Chaos Magick
Certaines des techniques de Spare, et plus particulièrement l’utilisation des sigils et la création d’« Alphabets du désir », furent adoptées et popularisées par Peter Carroll dans son livre Liber Null & Psychonaut. Carroll ainsi que d’autres comme Ray Sherwin ont joué un rôle important dans l’émergence des idées de Spare dans l’occulture britannique et de la Chaos Magick.
Actuellement, les praticiens de la Chaos Magick utilisent, sans parfois imaginer leurs sources, les techniques de la sigilisation, de l’oubli, de la posture de la mort, des alphabets sacrés personnels. On doit sans doute à Spare le dépouillement doctrinal des pratiques de la Chaos, qu’il s’agisse là d’un legs direct ou non, cela importe peu, mais nous sommes là, comme avec Spare, très loin des turpitudes monomaniaques de l’occultisme magique d’un Crowley ou d’un Bardon. Les longues pages dédiées par Spare à une forme de spiritualité absconse et parfois fumeuse doivent donc être remises dans leur contexte par rapport aux buts recherchés : la simplicité dans une pratique dépouillée des oripeaux de la magie cérémonielle psychorigide et dogmaniaque du passé.
Mini vocabulaire de Zos-Kia
Entre-deux : un état de transe dans lequel l’esprit est vide, la voie directe vers l’inconscient est libre. Dans cet état, les sigils sont plantés & ensuite oubliés. On peut le comparer au temps entre les temps.
Kia : le Moi atmosphérique. C’est le Moi opposé à l’ego ou à la véritable volonté. Kia est le système neural supérieur activé, libre de toute contrainte mortelle. Son symbole est l’oeil. Zos serait celui de son opposé.
Conscience Cosmique : la fusion avec le Kia, la conscience est libre de toute contrainte du corps ou des formes. Elle contient tout et peut se comparer à l’état de Samadhi.
Ni-Ni : état de vide (entre-deux) dans lequel la fusion avec le Kia peut arriver.
Posture de la Mort : Simulation de la mort, état dans lequel l’esprit est totalement vide. Cette technique est utilisée afin d’entrer dans l’état de « ni-ni ».
Zos : le corps, symbolisé par la main. Zos comprend toutes nos expériences & tous nos états d’esprit. Il est l’opposé du Kia. « Le corps considéré comme un tout, voilà ce que je nomme Zos. » (The Book of Pleasure)
** Ce vocabulaire est tiré de l’article « Zos-Kia » de Arawyn con Thanatos.
Les Œuvres principales :
− Earth Inferno (1905) ;
− A Book of Satyrs (1907) ;
− The Book of Pleasure (1913) ;
− The Focus of Life (1921) ;
− Anathema of Zos (1927).
« Mon ambition est la MORT,
Mort prématurée et avec elle l’amour de l’attention,
Et aussi le Joyau dans le Lotus.
La tristesse ne me retient pas
Si ce n’est le Péché et la Mort.
Je suis même exempt de mes propres PLAISIRS créés –
La stérilité de cette vie seule demeure.
Cependant, dans le désespoir nous commençons à percevoir la véritable lumière. AMEN.
Dans la faiblesse nous pouvons devenir forts.
Révère le Kia et Ton esprit sera alors APAISÉ »
(1) Keith Richmond, Discord In The Garden Of Janus – Aleister Crowley and Austin Osman Spare.
(2) Un document intitulé « le serment du probationer » de la Collection de Gerald Yorke, au Warburg Insitute, indique que Spare prit ses engagements le 10 juillet 1909.
(3) Dans l’édition de The Equinox, Vol. 1, No. 2, Londres, septembre 1909, Spare contribua avec deux dessins qui furent placés dans un article sur la géomancie. Il a également fourni deux diagrammes pour le même numéro de la revue, numérotés 33, le Jardin d’Eden, et 51, la Chute.
(4) Austin Osman Spare, The Book of Pleasure (Self-Love), The Psychology of Ecstasy, 1913
(5) Spare, Austin Osman, The Book of Pleasure, chap. « Definitions », I-H-O Books, 2005
(6) Spare, Austin Osman, The Book of Pleasure, chap. « The Consumers of Religion », I-H-O Books, 2005
(7) Spare, Austin Osman, The Book of Pleasure, chap. « Definitions », I-H-O Books, 2005
(8) Spare, Austin Osman, The Book of Pleasure, chap. « Be ye mystic », I-H-O Books, 2005
(9) Semple, W. Gavin, Zos-Kia, Fulgur Limited, 1995, page 7
(10) Carrol, Peter, Liber Null, page 26
(11) Austin Osman Spare, The Book of Pleasure.
(12) Spare, Austin Osman, The Book of Pleasure.
(13) Hine, Phil, Condensed Chaos, New Falcon, 1995, pp 127-128
(14) Austin Osman Spare, The Book of Pleasure.
(15) Austin Osam Spare, Anathema of Zos, p.15
(16) Austin Osman Spare, The Book of Pleasure (traduction française P. Pissier)
(17) Introduction à The Collected Works of Austin Osman Spare
(18) Austin Osman Spare, The Book of Pleasure (traduction française Spartakus FreeMann)
(19) Austin Osman Spare, The Book of Pleasure. (Traduction française par Spartakus FreeMann).
(20) En anglais « be-lie et be-live », qui est intraduisible en français, et que nous rendons par une confusion entre croître et croire.
(21) Austin Osman Spare, Creed of Zos vel Thanatos.
Cet article est basé sur :
La page Wikipedia « Austin Osman Spare ».
L’article « La Sigilisation au Sein de la Magie du Chaos », Spartakus FreeMann.
L’article « Zos-Kia » de Arawyn con Thanatos.
Zos-Kia : An Introductory Essay on the Art and Sorcery of Austin Osman Spare, Gavin Semple, Ed. Fulgur, 1995.