Par Louis Martinie
Nombreuses sont les Voies qui mènent vers l’intérieur, rares sont celles qui mènent vers le dehors. Babalon est au centre de ce labyrinthe. Ses chants se répercutent dans ses corridors sans cesse changeants. Le chant est absence de mots, car il contient les mots de tous les chants & Sa douce & nécrosée mélodie pousse les Bénis chaque fois plus loin à la recherche de Ses bras ouverts.
Le Kali-Yuga est un ardent nettoyage de printemps. C’est un temps de vagabondages sans but ; un temps pour cataloguer les allées aveugles de l’âme. Dans le Kali-Yuga, il n’y a aucun passage vers le cœur de cette Babalon. Les couloirs du labyrinthe se ferment les uns les autres. Essayer de suivre le son de Son chant vers sa source c’est se perdre dans un champ d’échos infinis. Le chant rebondit sur les murs, ricochant pour ouvrir de faux passages, emportant le chercheur imprudent.
Quelle est la nature de la Prostituée Sacrée dans cette vaste expansion du Kali-Yuga, dans cet Éon d’Horus, dans cet âge de guerres & de conflits ? « Maintenant, qu’il soit tout d’abord compris que je suis un dieu de Guerre et de Vengeance. Je les traiterai durement » (Liber AL, III:3). Avant de discuter de cette question, une bonne idée serait de survoler les caractéristiques de la Prostituée Sacrée.
La Prostituée Sacrée n’est, par nécessité, ni mâle ni femelle. Un mâle ou une femelle peut se tenir en avant (« pro », devant & « statuere », se tenir) & s’offrir aux autres. Nos traditions localisent, généralement, la fonction de la Prostituée Sacrée dans le domaine du féminin. Babalon, telle que décrite par Aleister Crowley, est un exemple de Prostituée Sacrée qui accueille tout le monde & ne S’offre à aucun. La position de Babalon est, la plupart du temps, remplie par une femme.
La Prostituée Sacrée marche en avant & offre l’initiation. Les Mystères auxquels Elle offre l’entrée comprennent l’état d’« absence de différence ». Le laid & le beau, l’abject & le délicieux sont acceptés comme des sources égales d’extase. Si Sa lumière doit briller dans une direction légèrement différente, Elle offre ensuite les hurlements & les joies vives que l’on trouve dans la dualité.
La prostituée séculière marche en avant & offre le sexe physique ou une de ses variantes. Les offrandes de la prostituée séculière échouent à enflammer les feux du cœur. Les offrandes sont localisées, restreintes à une petite zone dans un vaste champ d’expériences.
J’écris en tant qu’homme & c’est au travers du prisme de ma masculinité que j’appréhende les Mystères offerts par la Prostituée Sacrée. Elle entre dans une danse avec ma masculinité & les chiffres de Sa formule sont tracés par les pas de Sa danse. Ma dévotion envers Elle est corrompue si Elle vit en dehors de ma peau. Je m’indignerais bientôt de tout chiffre qui peut faire don d’un tel bénéfice. Si Elle peut donner, Elle peut aussi sûrement reprendre. L’échange semble ne marcher que dans un seul sens, la grâce coule, mais uniquement dans une seule direction. La dépendance lève sa tête d’Hydre & une nouvelle « salvatrice », qu’elle soit vierge ou pute, s’élève alors du sommet incroyablement petit du piédestal usé.
Afin d’éviter tout ressentiment & de s’assurer du respect, la Prostituée Sacrée doit être contenue En-dedans & Sa fonction doit être « prêtée » aux autres lorsque le besoin personnel & la Volonté des autres coïncident. Les grands initiateurs chevauchent tous à l’intérieur du Moi. Ils montent la personnalité de l’intérieur.
Comme homme, je marche dans le labyrinthe, mes pas résonnent aux sons du chant qui hante ses murs. « Nous avons choisi de nous incarner pendant le Kali-Yuga. C’est notre environnement ; c’est notre Ange qui nous parle, murmurant à nos mois secrets » (Crapulous Creeds, Soror Chen, p. 73). J’ai choisi de m’incarner en cet âge de Kali-Yuga. Ce labyrinthe qui entoure la Prostituée Sacrée en Sa manifestation en tant que Babalon n’est pas seulement un obstacle, j’ai choisi chaque arbuste qui pousse dans ses murs. Le labyrinthe lui-même a quelque chose à me dire à propos de Celle qui est en son centre. C’est à la fois une barrière & une clé.
Dans ce labyrinthe, tout mouvement est futile. Aller c’est revenir & revenir est s’en aller. C’est au travers de la quête que le centre est perdu. Il s’éloigne tandis que l’on s’en approche. Je dois être immobile si je veux que le centre se révèle à moi de lui-même. Le chant de sirène de cette Babalon est omniprésent. Elle, & le centre qu’Elle occupe, n’est pas moins omniprésente. Le labyrinthe est le Monde dans toute sa splendeur. Ce n’est pas un moyen pour arriver à une fin, mais c’est une manifestation de la fin elle-même. Le monde est un sens unique dans lequel la Prostituée Divine se dévoile Elle-même.
Une clé de la nature de la Prostituée Sacrée peut être trouvée dans la forme donnée par Crowley au mot Babalon. Aba est le mot hébreu pour « père ». Le père repose en Babalon, il grandit au sein de sa matrice. Labyrinthe & Labia (lèvres) partagent une orthographe intéressante même s’ils n’ont pas la même racine. Babalon est Celle qui contient Son propre père dans la totalité de Son Nom. Babalon est Celle qui donne naissance à Son propre père. En agissant ainsi, Babalon se tient en dehors du temps. Son trône se tient dans l’éternité ; dans l’outre-monde égyptien de l’Amenti [1] . Le labyrinthe, avec son faux début & sa fausse fin, ne peut exister que dans le temps. Le voyage au travers du labyrinthe de la Prostituée Sacrée sous l’apparence de Babalon est un voyage du temps vers l’éternité.
La nature de la Prostituée Sacrée à l’âge du Kali-Yuga est occultée. Elle & Sa fonction d’initiation sacrée apparaissent lointaines, cachées dans un labyrinthe. La stupide spiritualité si caractéristique du Kali-Yuga nourrit ces perceptions & il n’y a pas de voie au travers du labyrinthe tout aussi longtemps que ces perceptions existent. Réaliser que la Prostituée Sacrée avec ses dons de « l’absence de différence » & de « joie dans la dualité » peut s’opérer dans chaque moment de l’existence qui brise les perceptions qui séparent le chercheur de Celle qu’il cherche. Chaque endroit du labyrinthe devient une recherche du centre. La Prostituée Sacrée est alors réalisée dans le Moi & Elle peut être partagée entre tous.
La Babalon du Labyrinthe : la Prostituée Sacrée dans l’Amenti. Par Louis Martinie. Publié dans « Silver Star » Printemps 2007. Traduction par Spartakus FreeMann, juin 2008 e.v. au Nadir de Libertalia.
Par Louis Martinie
Nombreuses sont les Voies qui mènent vers l’intérieur, rares sont celles qui mènent vers le dehors. Babalon est au centre de ce labyrinthe. Ses chants se répercutent dans ses corridors sans cesse changeants. Le chant est absence de mots, car il contient les mots de tous les chants & Sa douce & nécrosée mélodie pousse les Bénis chaque fois plus loin à la recherche de Ses bras ouverts.
Le Kali-Yuga est un ardent nettoyage de printemps. C’est un temps de vagabondages sans but ; un temps pour cataloguer les allées aveugles de l’âme. Dans le Kali-Yuga, il n’y a aucun passage vers le cœur de cette Babalon. Les couloirs du labyrinthe se ferment les uns les autres. Essayer de suivre le son de Son chant vers sa source c’est se perdre dans un champ d’échos infinis. Le chant rebondit sur les murs, ricochant pour ouvrir de faux passages, emportant le chercheur imprudent.
Quelle est la nature de la Prostituée Sacrée dans cette vaste expansion du Kali-Yuga, dans cet Éon d’Horus, dans cet âge de guerres & de conflits ? « Maintenant, qu’il soit tout d’abord compris que je suis un dieu de Guerre et de Vengeance. Je les traiterai durement » (Liber AL, III:3). Avant de discuter de cette question, une bonne idée serait de survoler les caractéristiques de la Prostituée Sacrée.
La Prostituée Sacrée n’est, par nécessité, ni mâle ni femelle. Un mâle ou une femelle peut se tenir en avant (« pro », devant & « statuere », se tenir) & s’offrir aux autres. Nos traditions localisent, généralement, la fonction de la Prostituée Sacrée dans le domaine du féminin. Babalon, telle que décrite par Aleister Crowley, est un exemple de Prostituée Sacrée qui accueille tout le monde & ne S’offre à aucun. La position de Babalon est, la plupart du temps, remplie par une femme.
La Prostituée Sacrée marche en avant & offre l’initiation. Les Mystères auxquels Elle offre l’entrée comprennent l’état d’« absence de différence ». Le laid & le beau, l’abject & le délicieux sont acceptés comme des sources égales d’extase. Si Sa lumière doit briller dans une direction légèrement différente, Elle offre ensuite les hurlements & les joies vives que l’on trouve dans la dualité.
La prostituée séculière marche en avant & offre le sexe physique ou une de ses variantes. Les offrandes de la prostituée séculière échouent à enflammer les feux du cœur. Les offrandes sont localisées, restreintes à une petite zone dans un vaste champ d’expériences.
J’écris en tant qu’homme & c’est au travers du prisme de ma masculinité que j’appréhende les Mystères offerts par la Prostituée Sacrée. Elle entre dans une danse avec ma masculinité & les chiffres de Sa formule sont tracés par les pas de Sa danse. Ma dévotion envers Elle est corrompue si Elle vit en dehors de ma peau. Je m’indignerais bientôt de tout chiffre qui peut faire don d’un tel bénéfice. Si Elle peut donner, Elle peut aussi sûrement reprendre. L’échange semble ne marcher que dans un seul sens, la grâce coule, mais uniquement dans une seule direction. La dépendance lève sa tête d’Hydre & une nouvelle « salvatrice », qu’elle soit vierge ou pute, s’élève alors du sommet incroyablement petit du piédestal usé.
Afin d’éviter tout ressentiment & de s’assurer du respect, la Prostituée Sacrée doit être contenue En-dedans & Sa fonction doit être « prêtée » aux autres lorsque le besoin personnel & la Volonté des autres coïncident. Les grands initiateurs chevauchent tous à l’intérieur du Moi. Ils montent la personnalité de l’intérieur.
Comme homme, je marche dans le labyrinthe, mes pas résonnent aux sons du chant qui hante ses murs. « Nous avons choisi de nous incarner pendant le Kali-Yuga. C’est notre environnement ; c’est notre Ange qui nous parle, murmurant à nos mois secrets » (Crapulous Creeds, Soror Chen, p. 73). J’ai choisi de m’incarner en cet âge de Kali-Yuga. Ce labyrinthe qui entoure la Prostituée Sacrée en Sa manifestation en tant que Babalon n’est pas seulement un obstacle, j’ai choisi chaque arbuste qui pousse dans ses murs. Le labyrinthe lui-même a quelque chose à me dire à propos de Celle qui est en son centre. C’est à la fois une barrière & une clé.
Dans ce labyrinthe, tout mouvement est futile. Aller c’est revenir & revenir est s’en aller. C’est au travers de la quête que le centre est perdu. Il s’éloigne tandis que l’on s’en approche. Je dois être immobile si je veux que le centre se révèle à moi de lui-même. Le chant de sirène de cette Babalon est omniprésent. Elle, & le centre qu’Elle occupe, n’est pas moins omniprésente. Le labyrinthe est le Monde dans toute sa splendeur. Ce n’est pas un moyen pour arriver à une fin, mais c’est une manifestation de la fin elle-même. Le monde est un sens unique dans lequel la Prostituée Divine se dévoile Elle-même.
Une clé de la nature de la Prostituée Sacrée peut être trouvée dans la forme donnée par Crowley au mot Babalon. Aba est le mot hébreu pour « père ». Le père repose en Babalon, il grandit au sein de sa matrice. Labyrinthe & Labia (lèvres) partagent une orthographe intéressante même s’ils n’ont pas la même racine. Babalon est Celle qui contient Son propre père dans la totalité de Son Nom. Babalon est Celle qui donne naissance à Son propre père. En agissant ainsi, Babalon se tient en dehors du temps. Son trône se tient dans l’éternité ; dans l’outre-monde égyptien de l’Amenti [1] . Le labyrinthe, avec son faux début & sa fausse fin, ne peut exister que dans le temps. Le voyage au travers du labyrinthe de la Prostituée Sacrée sous l’apparence de Babalon est un voyage du temps vers l’éternité.
La nature de la Prostituée Sacrée à l’âge du Kali-Yuga est occultée. Elle & Sa fonction d’initiation sacrée apparaissent lointaines, cachées dans un labyrinthe. La stupide spiritualité si caractéristique du Kali-Yuga nourrit ces perceptions & il n’y a pas de voie au travers du labyrinthe tout aussi longtemps que ces perceptions existent. Réaliser que la Prostituée Sacrée avec ses dons de « l’absence de différence » & de « joie dans la dualité » peut s’opérer dans chaque moment de l’existence qui brise les perceptions qui séparent le chercheur de Celle qu’il cherche. Chaque endroit du labyrinthe devient une recherche du centre. La Prostituée Sacrée est alors réalisée dans le Moi & Elle peut être partagée entre tous.