Vanter les propriétés du « sang lunaire », ainsi qu’on l’appelle souvent, étant une manie des adeptes de la voie de la main gauche, parmi lesquels les Typhoniens disciples de Grant, j’ai décidé de vous faire profiter d’un extrait de la Philosophie Occulte de Cornélius Agrippa que je relis ces jours-ci. Le chapitre est intitulé « Quelques propriétés merveilleuses des poisons » et a au moins le mérite de démontrer qu’on n’a pas attendu le nouveau millénaire pour écrire des idioties.
Régalez-vous donc avec ce texte, initiés de la voie abrupte, de l’orteil droit ou du chemin en zigzag, mais n’oubliez jamais ce conseil éclairé de Phil Hine : « Ne mettez pas de crapaud vivant dans votre bouche » – En fait, si vous voulez mon avis, ne mettez rien du tout de suspect dans votre bouche.
Melmothia
Quelques propriétés merveilleuses des poisons.
Je ne ferai ici mention que de certains poisons et pour en donner quelques exemples, je commence par le sang des règles des femmes. A ce qu’on rapporte, son arrivée subite gâte les jeunes plantes : la vigne est pour toujours meurtrie par son seul contact, les fruits se dessèchent et tombent des arbres, les greffes meurent, les jardins sont brûlés, les miroirs se ternissent, l’acier des couteaux et des rasoirs perd son tranchant, l’ivoire sa beauté, le fer rouille et se corrompt rapidement. le cuivre prend à son seul contact une mauvaise odeur et un oxyde qui rend les chiens enragés s’ils en absorbent – ceux qui sont mordus par ces chiens ne peuvent guérir. Les essaims d’abeilles périssent ou quittent leurs ruches si celles-ci ont été souillées par ce sang, le lin noircit quand on le fait cuire, les juments gravides avortent à son contact comme aussi toutes les autres femelles. Les ânesses ne peuvent engendrer pendant autant d’années qu’elles ont mangé de grains d’orge souillés. Si on asperge des vêtements avec de la cendre de draps tachés de ce sang mêlée à de l’eau, leur pourpre change d’aspect : en outre cette solution ôte la couleur et l’éclat des fleurs.
On dit aussi que le sang menstruel peut guérir les fièvres tierce et quarte si on en asperge de la laine de bélier noir enfermée dans un bracelet d’argent et qu’on en fasse des fumigations.
On peut aussi, pour guérir les mêmes fièvres, frotter avec du sang menstruel la plante des pieds du malade, c’est paraît-il un remède très efficace. Il est plus efficace encore si la femme qui fournit le sang n’est pas tenue au courant de l’opération, dans ce cas alors on peut même guérir un malade atteint d’une crise d’épilepsie. Mêlé avec de l’eau c’est le meilleur remède si l’on a été mordu par un chien.
On dit que si les femmes en période vont nues à travers les moissons, elles font périr les petits vers, les scarabées et tous les insectes nuisibles. Il faut prendre garde cependant que ce ne soit pas au lever du soleil car alors la moisson se dessécherait. Ce sang repousse la grêle et les orages, il est précieux aussi contre la foudre : mais Pline a déjà dit tout cela [1].
Il faut que tu saches, que ce sang est encore plus toxique si le flux arrive en lune décroissante ; sa force est encore plus grande si le flux arrive lorsque la lune est encore invisible. et il devient poison sans remède s’il arrive en éclipse de lune et du soleil.
Le sang menstruel est très efficace la première année de son arrivée et dans le premier âge de la virginité. Si l’on en touche tous les montants des portes d’une maison, tous Ies sorts et les maléfices sont conjurés. L’on dit aussi que si les fils d’un vêtement en ont été touchés. ce vêtement devient incombustible et que, si on jette ce vêtement dans le feu les fils ne se distendent pas.
La racine de pivoine mêlée à du castoréum et à la raclure de draps imprégnés de sang cataménial donne un remède qui peut guérir un malade atteint d’épilepsie.
Si l’on fait rôtir l’estomac d’un cerf et qu’on y ajoute les fragments de draps souillés de ce sang, celui qui porte ce charme ne pourra tirer une seule flèche au but à la chasse.
Les cheveux prélevés sur une femme pendant cette période et mis sous le fumier engendrent des serpents. Les serpents sont mis en fuite par l’odeur que dégagent ces cheveux si on les fait brûler.
La force de ce charme est bien grande puisque nous voyons qu’il est poison pour tout ce qui est venimeux.
Du Sang Menstruel. Extrait de De Occulta Philosophia, Livre I, CHAPITRE XLII.
[1] Le passage est reproduit à peu près textuellement de Pline, Histoire Naturelle (Naturalis historia), XXVIII. 23.
Illustration : « tampon halloween crafts ». Image extraite du site Whipup.
Par Cornélius Agrippa
Vanter les propriétés du « sang lunaire », ainsi qu’on l’appelle souvent, étant une manie des adeptes de la voie de la main gauche, parmi lesquels les Typhoniens disciples de Grant, j’ai décidé de vous faire profiter d’un extrait de la Philosophie Occulte de Cornélius Agrippa que je relis ces jours-ci. Le chapitre est intitulé « Quelques propriétés merveilleuses des poisons » et a au moins le mérite de démontrer qu’on n’a pas attendu le nouveau millénaire pour écrire des idioties.
Régalez-vous donc avec ce texte, initiés de la voie abrupte, de l’orteil droit ou du chemin en zigzag, mais n’oubliez jamais ce conseil éclairé de Phil Hine : « Ne mettez pas de crapaud vivant dans votre bouche » – En fait, si vous voulez mon avis, ne mettez rien du tout de suspect dans votre bouche.
Melmothia
Quelques propriétés merveilleuses des poisons.
Je ne ferai ici mention que de certains poisons et pour en donner quelques exemples, je commence par le sang des règles des femmes. A ce qu’on rapporte, son arrivée subite gâte les jeunes plantes : la vigne est pour toujours meurtrie par son seul contact, les fruits se dessèchent et tombent des arbres, les greffes meurent, les jardins sont brûlés, les miroirs se ternissent, l’acier des couteaux et des rasoirs perd son tranchant, l’ivoire sa beauté, le fer rouille et se corrompt rapidement. le cuivre prend à son seul contact une mauvaise odeur et un oxyde qui rend les chiens enragés s’ils en absorbent – ceux qui sont mordus par ces chiens ne peuvent guérir. Les essaims d’abeilles périssent ou quittent leurs ruches si celles-ci ont été souillées par ce sang, le lin noircit quand on le fait cuire, les juments gravides avortent à son contact comme aussi toutes les autres femelles. Les ânesses ne peuvent engendrer pendant autant d’années qu’elles ont mangé de grains d’orge souillés. Si on asperge des vêtements avec de la cendre de draps tachés de ce sang mêlée à de l’eau, leur pourpre change d’aspect : en outre cette solution ôte la couleur et l’éclat des fleurs.
On dit aussi que le sang menstruel peut guérir les fièvres tierce et quarte si on en asperge de la laine de bélier noir enfermée dans un bracelet d’argent et qu’on en fasse des fumigations.
On peut aussi, pour guérir les mêmes fièvres, frotter avec du sang menstruel la plante des pieds du malade, c’est paraît-il un remède très efficace. Il est plus efficace encore si la femme qui fournit le sang n’est pas tenue au courant de l’opération, dans ce cas alors on peut même guérir un malade atteint d’une crise d’épilepsie. Mêlé avec de l’eau c’est le meilleur remède si l’on a été mordu par un chien.
On dit que si les femmes en période vont nues à travers les moissons, elles font périr les petits vers, les scarabées et tous les insectes nuisibles. Il faut prendre garde cependant que ce ne soit pas au lever du soleil car alors la moisson se dessécherait. Ce sang repousse la grêle et les orages, il est précieux aussi contre la foudre : mais Pline a déjà dit tout cela [1].
Il faut que tu saches, que ce sang est encore plus toxique si le flux arrive en lune décroissante ; sa force est encore plus grande si le flux arrive lorsque la lune est encore invisible. et il devient poison sans remède s’il arrive en éclipse de lune et du soleil.
Le sang menstruel est très efficace la première année de son arrivée et dans le premier âge de la virginité. Si l’on en touche tous les montants des portes d’une maison, tous Ies sorts et les maléfices sont conjurés. L’on dit aussi que si les fils d’un vêtement en ont été touchés. ce vêtement devient incombustible et que, si on jette ce vêtement dans le feu les fils ne se distendent pas.
La racine de pivoine mêlée à du castoréum et à la raclure de draps imprégnés de sang cataménial donne un remède qui peut guérir un malade atteint d’épilepsie.
Si l’on fait rôtir l’estomac d’un cerf et qu’on y ajoute les fragments de draps souillés de ce sang, celui qui porte ce charme ne pourra tirer une seule flèche au but à la chasse.
Les cheveux prélevés sur une femme pendant cette période et mis sous le fumier engendrent des serpents. Les serpents sont mis en fuite par l’odeur que dégagent ces cheveux si on les fait brûler.
La force de ce charme est bien grande puisque nous voyons qu’il est poison pour tout ce qui est venimeux.
[1] Le passage est reproduit à peu près textuellement de Pline, Histoire Naturelle (Naturalis historia), XXVIII. 23.