Philosophiquement, la magie du chaos se rapproche du Taoïsme, si l’on écarte le silence du taoïste. Le succès réside dans l’annihilation personnelle ; on retrouve donc des liens avec les écoles zen Nagarjuna et Madhyamika, et peut être plus encore avec l’école Nyingmapa du bouddhisme tibétain. Un rapide tour d’horizon des rites Chod livre également des indications sur la création de rituels chaos-magiques. Les effets d’une phrase zen sur un esprit ouvert se rapprochent de ce que cherche le mage du chaos. La pratique de la magie du chaos peut être déstabilisante, car elle a pour but de déconstruire la personnalité. Comme les drogues psychédéliques, elle peut totalement modifier votre réalité. Elle ne s’adresse pas aux personnes psychologiquement fragiles ni à ceux qui redoutent une confrontation avec leur moi profond.
La magie du chaos ne distingue pas entre magie « blanche » et magie « noire », car toute dualité est une illusion. Peter Carroll écrivait dans son Liber Null : « Les résultats ultimes de chaque voie ne seront très probablement pas différents, car les voies se croisent d’une manière qu’il est impossible de décrire. La soi-disant ‘voie du milieu’, ou sentier de la connaissance, consistant simplement en l’acquisition d’idées d’occasion, est une excuse pour ne rien entreprendre et ne mène nulle part ».
Moralement neutre, la magie du chaos ne s’adresse pas à ceux qui n’ont pas de code éthique personnel. En fait, la majorité des chaos-mages se définiraient comme des magiciens « noirs », mais pas dans le sens « maléfique » ; leur magie est « noire » parce qu’elle œuvre dans ce qui est sombre et caché.
Ces dernières années, la magie a été largement associée à la politique. La plupart des systèmes occultes contemporains tels que Thélème ou le néo paganisme sont populaires précisément parce qu’ils combinent des croyances sociopolitiques avec une vision magique de l’univers. La majorité des gens a besoin d’une carte sur laquelle placer ses croyances et opinions, or un système combinant magie et politique constitue une approche holistique plus riche en significations qu’un système seulement politique. Bien entendu, la politique n’a rien à voir avec la magie du chaos. La politique, c’est l’art de manipuler les autres pour former une communauté adhérant aux idées d’une minorité dominante.
La magie du chaos montre a contrario que tous nos efforts pour créer de l’ordre sont, en bout de course, vains. Organiser quelque chose, c’est essayer d’accroître la certitude de notre être, ce qui est contre l’éthique de la magie du chaos. La force de vie est spontanée, tout comme l’évolution elle-même est spontanée.
De la même manière, on peut dire que la religion et la magie du chaos sont, par essence, incompatibles. L’une est restrictive, l’autre est libératrice. L’une requiert que l’esprit se plie et s’accommode à un système de croyances prescrit, l’autre utilise les systèmes de croyances comme des outils avant de les détruire. La religion (et la plupart des systèmes magiques ont toujours été de nature religieuse) implique un même paradigme de pensée pour tous, en tout temps et en toute circonstance. La magie du chaos utilise des fragments souples de croyances, en d’autres termes : c’est une métacroyance. La religion tente de classer toute chose en bien ou en mal. La magie du chaos s’efforce de comprendre et englober tous les aspects de l’existence.
Les énergies, bonnes ou mauvaises, trouveront toujours un point d’équilibre, raison pour laquelle le bien peut venir du mal et réciproquement. Tenter de maîtriser pleinement les énergies universelles pour satisfaire nos mesquines exigences humaines sera toujours voué à l’échec. Prenons l’exemple d’une voiture. Même le véhicule le plus sûr, indépendamment de l’état de la chaussée, du conducteur, mais seulement parce qu’il roule, ne peut être véritablement protégé contre le risque d’accident. Par la suite, les gens plaident leur innocence : « je ne savais pas ce que je faisais » ou « je n’avais pas pensé aux conséquences ». Des phrases de ce genre sont le reflet dans la sagesse populaire de l’idée selon laquelle – et c’est la même chose en politique ou dans les réformes sociales, tous les êtres vivants sont soumis au flux du chaos. Aucun mouvement politique ou social n’a jamais suivi le cours prévu par ses fondateurs. Il a soit changé de forme, soit a disparu. Évoluer ou mourir.
Dans tous les cas, un groupe sur-politisé se retrouve toujours abruti et incapable de faire face aux changements de mentalité rapides qui peuvent se produire au sein de la population, particulièrement lorsque la conscience des individus se développe en fonction de considérations spirituelles et magiques. Comment peut-on sérieusement envisager un système combinant magie et politique qui ne serait pas radicalement instable ?
Nous voyons donc que la magie du chaos n’est pas faite pour ceux qui aiment théoriser durant des heures sur des questions de morale ou qui affectionnent de s’exprimer sur les forums politiques. Il ne s’agit pas d’adorer la Déesse Mère. Il ne s’agit pas de communiquer avec son ange gardien. Il ne s’agit pas de trouver votre Volonté véritable. Les religions de la Wicca, l’Hermétisme et Thélème peuvent répondre à ces questions si elles vous intéressent.
Le but de la magie du chaos est de développer des techniques de magie pratique générant des effets dans le monde extérieur en conformité avec la volonté du magicien, des effets identifiables, mesurables et pouvant être reproduits, susceptibles d’altérer l’esprit du magicien de façon catastrophique. La « structure » de la magie du chaos, si structure il y a, est une « non-structure ». La magie du chaos est radicalement non-hiérarchique, une anarchie magique – au sens propre du mot -, c’est-à-dire une magie sans dirigeants.
Le principe de la magie du chaos est que vous pouvez expérimenter ce que vous voulez, comme vous le voulez ; c’est l’application chaote de « Fais ce que Voudras sera le Tout de la Loi ». Ainsi où, quand, et dans quoi vous désirez vous impliquez ne dépend que de vous.
En résumé, la magie du chaos est la magie du chaos. Ce n’est pas une nouvelle religion, ni un nouveau système magique. Ce n’est pas un « système » tout court. Ne demandez pas à d’autres de vous expliquer ce qu’est la magie du chaos en termes sociologiques ou politiques, car même s’ils pouvaient créer des dogmes cohérents, cela n’aurait rien à voir avec le courant du chaos.
Ou comme Duke Ellington disait à propos du Jazz : « si je me mettais en tête de vous l’expliquer, vous ne seriez plus jamais capable de le comprendre ! ». Une personne qui cherche à explorer la magie du chaos doit abandonner tout présupposé en expérimentant le Vide par n’importe quel moyen, et non en développant des arguments philosophiques destinés à élaborer une approche systématique, ce qui est par essence inacceptable.
Étant chaos, le Vide n’a pas d’attributs propres. Voilà qui nous indique la difficulté de décrire la chose – puisque ce n’est pas une chose. La magie du chaos est une voie non dualiste susceptible d’égarer même ceux qui lui ont donné naissance, car comportant tellement de facettes que sa force vive sera perpétuellement éparpillée. La magie du chaos évoluera toujours indépendamment de sa source, quelle qu’elle soit. Personne ne peut vous « enseigner » la magie du chaos. Pour paraphraser Austin Spare : « Tout ce qu’un enseignant peut faire est de vous montrer sa propre splendeur ».
Ses pratiquants considèrent la magie du chaos comme étant le cumul de tous les systèmes, non comme un substitut à ceux-ci. La magie du chaos est un prolongement au-delà de notre réalité et au-delà des systèmes traditionnels. Si vous ne savez pas par où commencer, la multitude et la complexité des voies traditionnelles constituent une méthodologie mixte qui peut être une aide dans la recherche. Mais lorsque ces chemins auront été explorés, l’étape suivante sera de vous confronter au Vide et développer votre propre méthodologie – ce qui est l’essence de la magie du chaos. L’appréhender en que « système » souligne simplement le piège dans lequel l’être tombe lorsqu’il ressent le besoin de conceptualiser. La magie du chaos n’est ni cette magie ni celle-là. Ce n’est pas une « chose ». On pourrait dire que c’est la non-chose d’où provient toute chose.
La magie du chaos a appliqué des concepts tels que le déconstructionnisme postmoderne à l’étude de l’occulte et éclairci de nombreux points restés obscurs jusque-là.
Pour comprendre l’évolution du courant chaote, il est intéressant d’examiner ce qui s’est passé pendant les quelques années qui ont suivi sa naissance et son développement. On pourrait par exemple montrer que, d’un point de vue historique, la magie du chaos était la prochaine évolution « nécessaire » de l’occultisme occidental. Pour cela, il serait intéressant de comparer la naissance de la magie du chaos avec le renouveau qu’a connu l’occultisme au début du vingtième siècle, en sortant de la vieille tradition héritée de la Renaissance, grâce à des auteurs comme Aleister Crowley.
Crowley eut le mérite d’avoir synthétisé les meilleures informations et expériences acquises par la Golden Dawn et ses propres travaux et pèlerinages magiques. Il a nettoyé le tout, ne gardant que l’essentiel. Le résultat est un système magique solide et efficace pour les pratiquants occidentaux – peut être le tout premier. Si quelque chose peut lui être reproché, c’est de ne jamais avoir dissocié la magie du symbolisme religieux.
Dans le même temps, Austin Osman Spare fut le premier Occidental à bâtir un pont entre intellectualisme et chamanisme, développant son « système magique obsessionnel et free-style » ainsi que le concept de Vide. Spare est souvent considéré comme le premier adepte de magie du chaos et beaucoup de pratiquants, y compris moi-même, étudient son œuvre. La Sigilisation sert de technique de base aux mages du chaos : elle est simple, absolument libre de dogmes et particulièrement efficace pour obtenir des effets observables.
À l’heure actuelle, le regain d’intérêt pour l’occulte et le mystérieux fournit un climat positif pour les maisons d’édition et la diffusion de documents jusque-là rares, mettant à bas le fantasme du « secret pour le secret ». Cette demande populaire facilite le filtrage des informations trompeuses et l’apparition d’ouvrages modernes écrits par des occultistes portés sur les recherches dans de nouveaux secteurs et des techniques synthétisant les savoirs antérieurs, dont la plupart a également une certaine expérience des drogues.
De là, avec tout ce qu’il se passe, la magie chaos est devenue incontournable. En croisant les domaines, de jeunes et brillants occultistes, sans chapelle à défendre, ont refondu les vieilles méthodes en les mêlant à de nouvelles découvertes provenant de divers champs de la recherche – physique nucléaire, neurolinguistique, théorie des quanta, mathématiques du chaos, géométrie non euclidienne, etc.
Les écrits portant sur cette « nouvelle » magie sont ceux des auteurs suivants : Ray Sherwin, Lemuel Johnson, Lionel Snell, Peter J. Carroll, M. Phoenix, Frater U:.D:., Steven Wilson, Phil Hine, etc. ainsi que des traités imprimés et distribués dans des cercles restreints, qui rassemblent les méthodologies disparates. Des groupes de psychonautes se forment dans le but d’explorer ces méthodes et les améliorer en fonction de leur expérience, puis ces groupes dispersent, forment de nouvelles combinaisons humaines et expérimentales dont ils diffusent et font évoluer les connaissances. Ce qui en découle rebondit dans des domaines variés, depuis les travaux indépendants de magiciens anarchistes, aux nouvelles technologies, réseaux informatiques, production de musique électronique, tout cela mène à la création et la propagation de nouveaux mèmes qui font le tour de la planète.
Et tout cela vient d’arriver jusqu’à vous.
Ce nouveau courant est aussi libre que possible de tout dogme et toute éthique – uniquement orienté vers la découverte personnelle. Il est « La voie du guerrier », car son but est de dépasser l’approche dualiste de la magie qui a imprégné les diverses traditions et nous a emprisonnés dans la dimension physique des choses. Ce nouveau courant, par nature, dépasse notre compréhension, mais le chaos est son interface et la magie du chaos est son nom.
Communication sur la Magie du Chaos. Texte original : « Lecture on Chaos Magic », par Joseph Max. Conférence donnée le 18 février 1996, lors de la deuxième Convention annuelle Pantheacon – Red Lion Inn, San Jose Californie. Traduction française par Melmothia, 2010.
Philosophiquement, la magie du chaos se rapproche du Taoïsme, si l’on écarte le silence du taoïste. Le succès réside dans l’annihilation personnelle ; on retrouve donc des liens avec les écoles zen Nagarjuna et Madhyamika, et peut être plus encore avec l’école Nyingmapa du bouddhisme tibétain. Un rapide tour d’horizon des rites Chod livre également des indications sur la création de rituels chaos-magiques. Les effets d’une phrase zen sur un esprit ouvert se rapprochent de ce que cherche le mage du chaos. La pratique de la magie du chaos peut être déstabilisante, car elle a pour but de déconstruire la personnalité. Comme les drogues psychédéliques, elle peut totalement modifier votre réalité. Elle ne s’adresse pas aux personnes psychologiquement fragiles ni à ceux qui redoutent une confrontation avec leur moi profond.
La magie du chaos ne distingue pas entre magie « blanche » et magie « noire », car toute dualité est une illusion. Peter Carroll écrivait dans son Liber Null : « Les résultats ultimes de chaque voie ne seront très probablement pas différents, car les voies se croisent d’une manière qu’il est impossible de décrire. La soi-disant ‘voie du milieu’, ou sentier de la connaissance, consistant simplement en l’acquisition d’idées d’occasion, est une excuse pour ne rien entreprendre et ne mène nulle part ».
Moralement neutre, la magie du chaos ne s’adresse pas à ceux qui n’ont pas de code éthique personnel. En fait, la majorité des chaos-mages se définiraient comme des magiciens « noirs », mais pas dans le sens « maléfique » ; leur magie est « noire » parce qu’elle œuvre dans ce qui est sombre et caché.
Ces dernières années, la magie a été largement associée à la politique. La plupart des systèmes occultes contemporains tels que Thélème ou le néo paganisme sont populaires précisément parce qu’ils combinent des croyances sociopolitiques avec une vision magique de l’univers. La majorité des gens a besoin d’une carte sur laquelle placer ses croyances et opinions, or un système combinant magie et politique constitue une approche holistique plus riche en significations qu’un système seulement politique. Bien entendu, la politique n’a rien à voir avec la magie du chaos. La politique, c’est l’art de manipuler les autres pour former une communauté adhérant aux idées d’une minorité dominante.
La magie du chaos montre a contrario que tous nos efforts pour créer de l’ordre sont, en bout de course, vains. Organiser quelque chose, c’est essayer d’accroître la certitude de notre être, ce qui est contre l’éthique de la magie du chaos. La force de vie est spontanée, tout comme l’évolution elle-même est spontanée.
De la même manière, on peut dire que la religion et la magie du chaos sont, par essence, incompatibles. L’une est restrictive, l’autre est libératrice. L’une requiert que l’esprit se plie et s’accommode à un système de croyances prescrit, l’autre utilise les systèmes de croyances comme des outils avant de les détruire. La religion (et la plupart des systèmes magiques ont toujours été de nature religieuse) implique un même paradigme de pensée pour tous, en tout temps et en toute circonstance. La magie du chaos utilise des fragments souples de croyances, en d’autres termes : c’est une métacroyance. La religion tente de classer toute chose en bien ou en mal. La magie du chaos s’efforce de comprendre et englober tous les aspects de l’existence.
Les énergies, bonnes ou mauvaises, trouveront toujours un point d’équilibre, raison pour laquelle le bien peut venir du mal et réciproquement. Tenter de maîtriser pleinement les énergies universelles pour satisfaire nos mesquines exigences humaines sera toujours voué à l’échec. Prenons l’exemple d’une voiture. Même le véhicule le plus sûr, indépendamment de l’état de la chaussée, du conducteur, mais seulement parce qu’il roule, ne peut être véritablement protégé contre le risque d’accident. Par la suite, les gens plaident leur innocence : « je ne savais pas ce que je faisais » ou « je n’avais pas pensé aux conséquences ». Des phrases de ce genre sont le reflet dans la sagesse populaire de l’idée selon laquelle – et c’est la même chose en politique ou dans les réformes sociales, tous les êtres vivants sont soumis au flux du chaos. Aucun mouvement politique ou social n’a jamais suivi le cours prévu par ses fondateurs. Il a soit changé de forme, soit a disparu. Évoluer ou mourir.
Dans tous les cas, un groupe sur-politisé se retrouve toujours abruti et incapable de faire face aux changements de mentalité rapides qui peuvent se produire au sein de la population, particulièrement lorsque la conscience des individus se développe en fonction de considérations spirituelles et magiques. Comment peut-on sérieusement envisager un système combinant magie et politique qui ne serait pas radicalement instable ?
Nous voyons donc que la magie du chaos n’est pas faite pour ceux qui aiment théoriser durant des heures sur des questions de morale ou qui affectionnent de s’exprimer sur les forums politiques. Il ne s’agit pas d’adorer la Déesse Mère. Il ne s’agit pas de communiquer avec son ange gardien. Il ne s’agit pas de trouver votre Volonté véritable. Les religions de la Wicca, l’Hermétisme et Thélème peuvent répondre à ces questions si elles vous intéressent.
Le but de la magie du chaos est de développer des techniques de magie pratique générant des effets dans le monde extérieur en conformité avec la volonté du magicien, des effets identifiables, mesurables et pouvant être reproduits, susceptibles d’altérer l’esprit du magicien de façon catastrophique. La « structure » de la magie du chaos, si structure il y a, est une « non-structure ». La magie du chaos est radicalement non-hiérarchique, une anarchie magique – au sens propre du mot -, c’est-à-dire une magie sans dirigeants.
Le principe de la magie du chaos est que vous pouvez expérimenter ce que vous voulez, comme vous le voulez ; c’est l’application chaote de « Fais ce que Voudras sera le Tout de la Loi ». Ainsi où, quand, et dans quoi vous désirez vous impliquez ne dépend que de vous.
En résumé, la magie du chaos est la magie du chaos. Ce n’est pas une nouvelle religion, ni un nouveau système magique. Ce n’est pas un « système » tout court. Ne demandez pas à d’autres de vous expliquer ce qu’est la magie du chaos en termes sociologiques ou politiques, car même s’ils pouvaient créer des dogmes cohérents, cela n’aurait rien à voir avec le courant du chaos.
Ou comme Duke Ellington disait à propos du Jazz : « si je me mettais en tête de vous l’expliquer, vous ne seriez plus jamais capable de le comprendre ! ». Une personne qui cherche à explorer la magie du chaos doit abandonner tout présupposé en expérimentant le Vide par n’importe quel moyen, et non en développant des arguments philosophiques destinés à élaborer une approche systématique, ce qui est par essence inacceptable.
Étant chaos, le Vide n’a pas d’attributs propres. Voilà qui nous indique la difficulté de décrire la chose – puisque ce n’est pas une chose. La magie du chaos est une voie non dualiste susceptible d’égarer même ceux qui lui ont donné naissance, car comportant tellement de facettes que sa force vive sera perpétuellement éparpillée. La magie du chaos évoluera toujours indépendamment de sa source, quelle qu’elle soit. Personne ne peut vous « enseigner » la magie du chaos. Pour paraphraser Austin Spare : « Tout ce qu’un enseignant peut faire est de vous montrer sa propre splendeur ».
Ses pratiquants considèrent la magie du chaos comme étant le cumul de tous les systèmes, non comme un substitut à ceux-ci. La magie du chaos est un prolongement au-delà de notre réalité et au-delà des systèmes traditionnels. Si vous ne savez pas par où commencer, la multitude et la complexité des voies traditionnelles constituent une méthodologie mixte qui peut être une aide dans la recherche. Mais lorsque ces chemins auront été explorés, l’étape suivante sera de vous confronter au Vide et développer votre propre méthodologie – ce qui est l’essence de la magie du chaos. L’appréhender en que « système » souligne simplement le piège dans lequel l’être tombe lorsqu’il ressent le besoin de conceptualiser. La magie du chaos n’est ni cette magie ni celle-là. Ce n’est pas une « chose ». On pourrait dire que c’est la non-chose d’où provient toute chose.
La magie du chaos a appliqué des concepts tels que le déconstructionnisme postmoderne à l’étude de l’occulte et éclairci de nombreux points restés obscurs jusque-là.
Pour comprendre l’évolution du courant chaote, il est intéressant d’examiner ce qui s’est passé pendant les quelques années qui ont suivi sa naissance et son développement. On pourrait par exemple montrer que, d’un point de vue historique, la magie du chaos était la prochaine évolution « nécessaire » de l’occultisme occidental. Pour cela, il serait intéressant de comparer la naissance de la magie du chaos avec le renouveau qu’a connu l’occultisme au début du vingtième siècle, en sortant de la vieille tradition héritée de la Renaissance, grâce à des auteurs comme Aleister Crowley.
Crowley eut le mérite d’avoir synthétisé les meilleures informations et expériences acquises par la Golden Dawn et ses propres travaux et pèlerinages magiques. Il a nettoyé le tout, ne gardant que l’essentiel. Le résultat est un système magique solide et efficace pour les pratiquants occidentaux – peut être le tout premier. Si quelque chose peut lui être reproché, c’est de ne jamais avoir dissocié la magie du symbolisme religieux.
Dans le même temps, Austin Osman Spare fut le premier Occidental à bâtir un pont entre intellectualisme et chamanisme, développant son « système magique obsessionnel et free-style » ainsi que le concept de Vide. Spare est souvent considéré comme le premier adepte de magie du chaos et beaucoup de pratiquants, y compris moi-même, étudient son œuvre. La Sigilisation sert de technique de base aux mages du chaos : elle est simple, absolument libre de dogmes et particulièrement efficace pour obtenir des effets observables.
À l’heure actuelle, le regain d’intérêt pour l’occulte et le mystérieux fournit un climat positif pour les maisons d’édition et la diffusion de documents jusque-là rares, mettant à bas le fantasme du « secret pour le secret ». Cette demande populaire facilite le filtrage des informations trompeuses et l’apparition d’ouvrages modernes écrits par des occultistes portés sur les recherches dans de nouveaux secteurs et des techniques synthétisant les savoirs antérieurs, dont la plupart a également une certaine expérience des drogues.
De là, avec tout ce qu’il se passe, la magie chaos est devenue incontournable. En croisant les domaines, de jeunes et brillants occultistes, sans chapelle à défendre, ont refondu les vieilles méthodes en les mêlant à de nouvelles découvertes provenant de divers champs de la recherche – physique nucléaire, neurolinguistique, théorie des quanta, mathématiques du chaos, géométrie non euclidienne, etc.
Les écrits portant sur cette « nouvelle » magie sont ceux des auteurs suivants : Ray Sherwin, Lemuel Johnson, Lionel Snell, Peter J. Carroll, M. Phoenix, Frater U:.D:., Steven Wilson, Phil Hine, etc. ainsi que des traités imprimés et distribués dans des cercles restreints, qui rassemblent les méthodologies disparates. Des groupes de psychonautes se forment dans le but d’explorer ces méthodes et les améliorer en fonction de leur expérience, puis ces groupes dispersent, forment de nouvelles combinaisons humaines et expérimentales dont ils diffusent et font évoluer les connaissances. Ce qui en découle rebondit dans des domaines variés, depuis les travaux indépendants de magiciens anarchistes, aux nouvelles technologies, réseaux informatiques, production de musique électronique, tout cela mène à la création et la propagation de nouveaux mèmes qui font le tour de la planète.
Et tout cela vient d’arriver jusqu’à vous.
Ce nouveau courant est aussi libre que possible de tout dogme et toute éthique – uniquement orienté vers la découverte personnelle. Il est « La voie du guerrier », car son but est de dépasser l’approche dualiste de la magie qui a imprégné les diverses traditions et nous a emprisonnés dans la dimension physique des choses. Ce nouveau courant, par nature, dépasse notre compréhension, mais le chaos est son interface et la magie du chaos est son nom.