L’article sur la « Possession par l’action » s’achevait sur une conclusion trouble appelant de nouveaux développements. Les voici.
Une précision sur la réalité
Dans la présente modélisation, la réalité n’est pas ce qui est ; la réalité est un espace de dimension finie [1] (à savoir : potentiellement illimité, mais dépendant d’un nombre fini de paramètres) dans laquelle nos existences prennent un sens, une « réalité », où nous inscrivons notre pensée, notre esprit, notre vie. Mais, dans une réalité, nous sommes « exprimés » plus que nous ne sommes vraiment. Cependant il ne faudrait pas oublier que les choses qui sont ont nécessairement besoin d’une réalité pour se manifester, et il semble donc peu pertinent d’en déprécier le rôle.
Surtout, la réalité se définit comme un ensemble de possibilités : n’est réel, dans une réalité donnée, que ce qui peut être réel. La possibilité de quelque chose précède donc le caractère réel de cette chose ; avant d’être exprimé, il faut pouvoir être exprimé. La synchronicité pourrait trouver une explication partielle dans cette représentation : parce qu’une théorie scientifique par exemple accède à la possibilité d’être découverte, parce qu’elle s’inscrit dans la réalité, alors il y a des probabilités non négligeables qu’elle soit effectivement découverte, en plusieurs endroits simultanément. La réalité, ici, n’apparaît pas comme quelque chose de fixe, mais de transformable. Or, cette transformation suppose une incantation : c’est l’appel aux Démons, aux Possibles, tel qu’il a été évoqué dans la Théorie Démoniste des Possibles. Le rituel incantatoire étant la plupart du temps un phénomène non-intentionné et aléatoire, il n’est pas surprenant que les révolutions de la pensée humaine se répartissent dans le temps sans qu’une loi rationnelle préside à cette répartition. Ici, on observera que dans cette perspective, la Magie, parce qu’elle est à même d’appeler des Possibles selon des techniques qu’elle s’efforce de développer, est capable de contribuer de façon majeure et prépondérante à la recherche scientifique, ainsi qu’à la métamorphose sociale.
Les données latentes
La réalité ne prend donc en considération qu’un nombre fini de paramètres, exprimant de façon presque toujours partielle les choses qui se manifestent en elle, et en écartant beaucoup d’autres. Toutes ces choses qui sont et qui demeurent en-dehors seront appelées « données latentes » : c’est ce qui est, mais que nous n’utilisons pas pour la construction du réel, que nous laissons de côté, que notre réalité ne nous permet pas d’intégrer autrement que par l’intermédiaire démoniaque. Il est pourtant envisageable de les percevoir d’une façon ou d’une autre. En effet, puisque nous ne sommes manifestés que partiellement dans la réalité vécue, qu’il y a en nous une part d’inexprimé (dont la réalité ne nous permet pas de quantifier l’importance), il est tout à fait envisageable que cet autre aspect de nous-mêmes [2] côtoie certaines choses extérieures, approche les données latentes. Ce qui est étranger au réel n’est donc pas nécessairement étranger à nous-mêmes [4].
Une analogie mathématique sommaire pourrait l’illustrer. Imaginons une réalité qui se résume à deux axes de coordonnées orthogonaux, Ox et Oy. Dans cette réalité R, on considère un vecteur v, tel que v=vxex+vyey. Dans la réalité Rx, constituée uniquement de l’axe des x, v est exprimé uniquement suivant sa composante vxex ; inversement, dans Ry, la réalité de l’axe des y, v se résume à vyey. Dans chacune des réalités Rx et Ry, la composante respectivement associée n’a rien de commun avec sa comparse ; pourtant, dans R, elles constituent une même entité.
Considérons maintenant un deuxième vecteur v2 tel que v2=- vxex+vyey. Dans la réalité Rx, v se réduit à vxex et v2 à -vxex ; ils sont donc tout à fait décorrélés, sans lien aucun entre eux. Dans la réalité Ry, à l’inverse, v est égal à vyey et v2 également : ils sont donc égaux et représentent la même chose ; c’est là l’illustration de la précision apportée dans la note 2, sur la non-conservation très probable de l’être à travers les réalités.
Rêverie sur la création
La création est toute autre chose. Jusqu’ici, seules les réalités, soit les systèmes d’expression, ont été considérées ; était modifié le manifesté, et non pas ce qui est. La création, dans un tel modèle, n’a rien de commun avec la manifestation. Elle est un ajout de données à partir du vide, le processus d’apparition d’un nouveau « quelque chose » et donc tout à fait indépendante des réalités. La chose créée peut se trouver exprimée ou non dans n’importe quelle réalité, exprimée partiellement ou complètement, cela n’a pas d’importance. De plus, le fait que cette chose soit ou non réalisée est également indépendant de la réalité du créateur, quand bien même il y a réalité du créateur, quand bien même il y a créateur. À cet instant précis – quoique le temps soit encore une part de notre réalité -, il est assez probable que nous soyons chacun en train de créer quelque chose, mais nous ne disposons d’aucun moyen usuel pour en avoir connaissance. Une fois la chose créée, pour qu’elle s’insère dans notre réel, il faut qu’elle acquière d’abord la possibilité de s’y insérer. Il s’agit donc ici d’un processus complètement flou, à première vue inutilisable, encore à l’état de chimère. Mais, qui maîtriserait [4] le triptyque création-possession-manifestation (créer quelque chose, rendre possible, puis effective, l’existence de cette chose dans la réalité) disposerait d’un potentiel littéralement infini et illimité [5]. Voilà qui ouvre des perspectives – mais le présent article s’achève là.
Modélisation des Réels, Courtepattes
Notes :
[1] A contrario, « ce qui est » est de dimension infinie.
[2] Cette façon d’exprimer pourrait laisser supposer que l’être se conserve en-dehors de la réalité, or l’idée d’être et le vécu de soi comme un être sont eux-mêmes des expressions intrinsèques à notre réalité. Il est beaucoup plus probable que ce que nous sommes en effet ne possède absolument aucun caractère individuel, et que nous soyons entremêlés, en-dehors des réalités, à des choses qui, exprimées dans notre réalité, nous paraissent tout à fait distinctes de nous-mêmes. Il se peut par exemple que vous possédiez avec une plante, un animal, une idée, une plaisanterie même, une partie commune dont vous ne pouvez absolument pas supposer la nature.
[3] On ne cachera pas ici l’inspiration lovecraftienne de l’article.
[4] Ici encore, le « qui » est employé improprement.
[5] Dans un réel donné, s’entend.
L’article sur la « Possession par l’action » s’achevait sur une conclusion trouble appelant de nouveaux développements. Les voici.
Une précision sur la réalité
Dans la présente modélisation, la réalité n’est pas ce qui est ; la réalité est un espace de dimension finie [1] (à savoir : potentiellement illimité, mais dépendant d’un nombre fini de paramètres) dans laquelle nos existences prennent un sens, une « réalité », où nous inscrivons notre pensée, notre esprit, notre vie. Mais, dans une réalité, nous sommes « exprimés » plus que nous ne sommes vraiment. Cependant il ne faudrait pas oublier que les choses qui sont ont nécessairement besoin d’une réalité pour se manifester, et il semble donc peu pertinent d’en déprécier le rôle.
Surtout, la réalité se définit comme un ensemble de possibilités : n’est réel, dans une réalité donnée, que ce qui peut être réel. La possibilité de quelque chose précède donc le caractère réel de cette chose ; avant d’être exprimé, il faut pouvoir être exprimé. La synchronicité pourrait trouver une explication partielle dans cette représentation : parce qu’une théorie scientifique par exemple accède à la possibilité d’être découverte, parce qu’elle s’inscrit dans la réalité, alors il y a des probabilités non négligeables qu’elle soit effectivement découverte, en plusieurs endroits simultanément. La réalité, ici, n’apparaît pas comme quelque chose de fixe, mais de transformable. Or, cette transformation suppose une incantation : c’est l’appel aux Démons, aux Possibles, tel qu’il a été évoqué dans la Théorie Démoniste des Possibles. Le rituel incantatoire étant la plupart du temps un phénomène non-intentionné et aléatoire, il n’est pas surprenant que les révolutions de la pensée humaine se répartissent dans le temps sans qu’une loi rationnelle préside à cette répartition. Ici, on observera que dans cette perspective, la Magie, parce qu’elle est à même d’appeler des Possibles selon des techniques qu’elle s’efforce de développer, est capable de contribuer de façon majeure et prépondérante à la recherche scientifique, ainsi qu’à la métamorphose sociale.
Les données latentes
La réalité ne prend donc en considération qu’un nombre fini de paramètres, exprimant de façon presque toujours partielle les choses qui se manifestent en elle, et en écartant beaucoup d’autres. Toutes ces choses qui sont et qui demeurent en-dehors seront appelées « données latentes » : c’est ce qui est, mais que nous n’utilisons pas pour la construction du réel, que nous laissons de côté, que notre réalité ne nous permet pas d’intégrer autrement que par l’intermédiaire démoniaque. Il est pourtant envisageable de les percevoir d’une façon ou d’une autre. En effet, puisque nous ne sommes manifestés que partiellement dans la réalité vécue, qu’il y a en nous une part d’inexprimé (dont la réalité ne nous permet pas de quantifier l’importance), il est tout à fait envisageable que cet autre aspect de nous-mêmes [2] côtoie certaines choses extérieures, approche les données latentes. Ce qui est étranger au réel n’est donc pas nécessairement étranger à nous-mêmes [4].
Une analogie mathématique sommaire pourrait l’illustrer. Imaginons une réalité qui se résume à deux axes de coordonnées orthogonaux, Ox et Oy. Dans cette réalité R, on considère un vecteur v, tel que v=vxex+vyey. Dans la réalité Rx, constituée uniquement de l’axe des x, v est exprimé uniquement suivant sa composante vxex ; inversement, dans Ry, la réalité de l’axe des y, v se résume à vyey. Dans chacune des réalités Rx et Ry, la composante respectivement associée n’a rien de commun avec sa comparse ; pourtant, dans R, elles constituent une même entité.
Considérons maintenant un deuxième vecteur v2 tel que v2=- vxex+vyey. Dans la réalité Rx, v se réduit à vxex et v2 à -vxex ; ils sont donc tout à fait décorrélés, sans lien aucun entre eux. Dans la réalité Ry, à l’inverse, v est égal à vyey et v2 également : ils sont donc égaux et représentent la même chose ; c’est là l’illustration de la précision apportée dans la note 2, sur la non-conservation très probable de l’être à travers les réalités.
Rêverie sur la création
La création est toute autre chose. Jusqu’ici, seules les réalités, soit les systèmes d’expression, ont été considérées ; était modifié le manifesté, et non pas ce qui est. La création, dans un tel modèle, n’a rien de commun avec la manifestation. Elle est un ajout de données à partir du vide, le processus d’apparition d’un nouveau « quelque chose » et donc tout à fait indépendante des réalités. La chose créée peut se trouver exprimée ou non dans n’importe quelle réalité, exprimée partiellement ou complètement, cela n’a pas d’importance. De plus, le fait que cette chose soit ou non réalisée est également indépendant de la réalité du créateur, quand bien même il y a réalité du créateur, quand bien même il y a créateur. À cet instant précis – quoique le temps soit encore une part de notre réalité -, il est assez probable que nous soyons chacun en train de créer quelque chose, mais nous ne disposons d’aucun moyen usuel pour en avoir connaissance. Une fois la chose créée, pour qu’elle s’insère dans notre réel, il faut qu’elle acquière d’abord la possibilité de s’y insérer. Il s’agit donc ici d’un processus complètement flou, à première vue inutilisable, encore à l’état de chimère. Mais, qui maîtriserait [4] le triptyque création-possession-manifestation (créer quelque chose, rendre possible, puis effective, l’existence de cette chose dans la réalité) disposerait d’un potentiel littéralement infini et illimité [5]. Voilà qui ouvre des perspectives – mais le présent article s’achève là.
Notes :
[1] A contrario, « ce qui est » est de dimension infinie.
[2] Cette façon d’exprimer pourrait laisser supposer que l’être se conserve en-dehors de la réalité, or l’idée d’être et le vécu de soi comme un être sont eux-mêmes des expressions intrinsèques à notre réalité. Il est beaucoup plus probable que ce que nous sommes en effet ne possède absolument aucun caractère individuel, et que nous soyons entremêlés, en-dehors des réalités, à des choses qui, exprimées dans notre réalité, nous paraissent tout à fait distinctes de nous-mêmes. Il se peut par exemple que vous possédiez avec une plante, un animal, une idée, une plaisanterie même, une partie commune dont vous ne pouvez absolument pas supposer la nature.
[3] On ne cachera pas ici l’inspiration lovecraftienne de l’article.
[4] Ici encore, le « qui » est employé improprement.
[5] Dans un réel donné, s’entend.