K.B. : Quel est le lien entre les sociétés secrètes et la théorie de la conspiration ? Ce thème semble être une question très sensible pour les libéraux, mais il également récupéré par de très obscurs fanatiques de l’extrême droite.
H.B. : J’adore la théorie de la conspiration. Je l’utilise d’ailleurs dans mon œuvre, mais je m’efforce d’en conserver le côté métaphorique en évitant de me laisser emporter au risque de devenir crédule envers une quelconque conspiration, & ce pour un certain nombre de raisons.
Tout d’abord, parce qu’il y a un vieux problème que même Tolstoï a dû prendre à bras le corps : est-ce que l’histoire est construite par de grands personnages, ou bien l’histoire est-elle plutôt faite par l’émergence inconsciente de mouvements économiques & sociaux qui seraient bien plus vastes & qui iraient bien plus loin que n’importe quel individu. Dans ce cas, Napoléon ne serait que celui qui a surfé sur la vague ; plutôt que de diriger, il n’aurait fait que suivre la vague de l’histoire.
La théorie historique des grands hommes est un piège très dangereux &, très clairement, si vous croyez littéralement à la théorie de la conspiration, alors vous croyez dans cette théorie des grands hommes ; vous croyez qu’un très petit groupe d’individus brillants peuvent réellement conspirer afin de changer l’histoire, habituellement à leur avantage.
XXX : Comme Bill Gates ?
H.B. : Par exemple. Est-il le leader de ce bidule ou ne fait-il que suivre la vague d’un développement techno-économique quelconque ? Et si ce n’est pas Bill Gates, se pourrait-il que ce soit quelqu’un d’autre ? Robert Anton Wilson aime à dire : « quand c’est le temps des moteurs à vapeur alors ça fume ». Comme lorsque le temps est à la pluie : il pleut. Lorsque le temps est venu pour les moteurs à vapeur, alors un ingénieur génial produit ces moteurs à vapeur. En fait, nous avons de nombreux exemples où les mêmes découvertes scientifiques ont été effectuées simultanément par cinq ou six personnes de par le monde. Non parce qu’un quelconque anima jungien archétypal flotte dans l’air, mais parce que la science est arrivée à ce point ; & cinq ou six personnes sont assez intelligentes pour réaliser que c’est le cas & ce qui convient de faire. Il y a aussi le fait que le moteur à vapeur fut en réalité construit sur une base scientifique incorrecte, si je ne me trompe. Il fut conçu par quelqu’un qui pensait qu’il était en train de réaliser quelque chose, mais à la fin il en fit autre chose d’autre & cela se révéla être un moteur à vapeur. Cela est arrivé très souvent également.
Le problème avec la théorie de la conspiration c’est qu’elle consiste à croire qu’il existe un groupe particulier d’êtres humains qui contrôle notre destinée. C’est là un extrême philosophique dans lequel je ne désire pas m’aventurer.
D’un autre côté, il est évident que les gens conspirent. Il y a tout un tas de conspirations, de forces secrètes tapies derrière la démonstration politique du pouvoir.
Mais il est clair qu’il n’existe pas le moindre politicien américain connu qui ait le moindre pouvoir. Ils ne font que bosser pour de grandes entreprises & des intérêts économiques comme le pétrole ou le marché global lui-même.
Le meilleur modèle serait encore l’existence de nombreuses, ou du moins de plusieurs, conspirations & qu’elles s’entrecroisent, qu’elles sont en concurrence, se fondent l’une dans l’autre, se séparent… Si nous voulons savoir ce qu’il se passe, si nous voulons comprendre l’histoire telle qu’elle est en train de se dérouler, nous devons connaître, & apprendre quelque chose de ces conspirations. Ici, une nouvelle fois, l’esprit critique est un outil utile.
La Conspiration selon Hakim Bey
K.B. : Quel est le lien entre les sociétés secrètes et la théorie de la conspiration ? Ce thème semble être une question très sensible pour les libéraux, mais il également récupéré par de très obscurs fanatiques de l’extrême droite.
H.B. : J’adore la théorie de la conspiration. Je l’utilise d’ailleurs dans mon œuvre, mais je m’efforce d’en conserver le côté métaphorique en évitant de me laisser emporter au risque de devenir crédule envers une quelconque conspiration, & ce pour un certain nombre de raisons.
Tout d’abord, parce qu’il y a un vieux problème que même Tolstoï a dû prendre à bras le corps : est-ce que l’histoire est construite par de grands personnages, ou bien l’histoire est-elle plutôt faite par l’émergence inconsciente de mouvements économiques & sociaux qui seraient bien plus vastes & qui iraient bien plus loin que n’importe quel individu. Dans ce cas, Napoléon ne serait que celui qui a surfé sur la vague ; plutôt que de diriger, il n’aurait fait que suivre la vague de l’histoire.
La théorie historique des grands hommes est un piège très dangereux &, très clairement, si vous croyez littéralement à la théorie de la conspiration, alors vous croyez dans cette théorie des grands hommes ; vous croyez qu’un très petit groupe d’individus brillants peuvent réellement conspirer afin de changer l’histoire, habituellement à leur avantage.
XXX : Comme Bill Gates ?
H.B. : Par exemple. Est-il le leader de ce bidule ou ne fait-il que suivre la vague d’un développement techno-économique quelconque ? Et si ce n’est pas Bill Gates, se pourrait-il que ce soit quelqu’un d’autre ? Robert Anton Wilson aime à dire : « quand c’est le temps des moteurs à vapeur alors ça fume ». Comme lorsque le temps est à la pluie : il pleut. Lorsque le temps est venu pour les moteurs à vapeur, alors un ingénieur génial produit ces moteurs à vapeur. En fait, nous avons de nombreux exemples où les mêmes découvertes scientifiques ont été effectuées simultanément par cinq ou six personnes de par le monde. Non parce qu’un quelconque anima jungien archétypal flotte dans l’air, mais parce que la science est arrivée à ce point ; & cinq ou six personnes sont assez intelligentes pour réaliser que c’est le cas & ce qui convient de faire. Il y a aussi le fait que le moteur à vapeur fut en réalité construit sur une base scientifique incorrecte, si je ne me trompe. Il fut conçu par quelqu’un qui pensait qu’il était en train de réaliser quelque chose, mais à la fin il en fit autre chose d’autre & cela se révéla être un moteur à vapeur. Cela est arrivé très souvent également.
Le problème avec la théorie de la conspiration c’est qu’elle consiste à croire qu’il existe un groupe particulier d’êtres humains qui contrôle notre destinée. C’est là un extrême philosophique dans lequel je ne désire pas m’aventurer.
D’un autre côté, il est évident que les gens conspirent. Il y a tout un tas de conspirations, de forces secrètes tapies derrière la démonstration politique du pouvoir.
Mais il est clair qu’il n’existe pas le moindre politicien américain connu qui ait le moindre pouvoir. Ils ne font que bosser pour de grandes entreprises & des intérêts économiques comme le pétrole ou le marché global lui-même.
Le meilleur modèle serait encore l’existence de nombreuses, ou du moins de plusieurs, conspirations & qu’elles s’entrecroisent, qu’elles sont en concurrence, se fondent l’une dans l’autre, se séparent… Si nous voulons savoir ce qu’il se passe, si nous voulons comprendre l’histoire telle qu’elle est en train de se dérouler, nous devons connaître, & apprendre quelque chose de ces conspirations. Ici, une nouvelle fois, l’esprit critique est un outil utile.